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Vidéo: France 3 - 49:13



Un film de Patrice Bollon et Bernard Jouridain
Producteurs délégués: Arnaud Hamelin, Jean-Jacques Mauriat
Producteur exécutif: Hervé Clerc
Une coproduction France 3, SIIS Interimage, Sunset Presse
Avec les voix de Jean-Pierre Kalfon et Edgard Givry

Ainsi parlait Cioran

Ainsi parlait Cioran

Entretien avec Jean-François Duval - 1979

Page 24, fragment d'un entretien alors inédit avec Cioran:






Jean-François Duval: Vous écrivez: "Tout n'est pas perdu. Restent
les barbares"... Que voulez vous dire?

Emile M. Cioran: [...] Et d'ailleurs, la barbarie, maintenant, ça se
passe d'une autre façon. Il n'y a plus d'invasions barbares. Parce
que les barbares s'insinuent. Déjà, Paris est en partie occupé par
les barbares. Il y a une infiltration - c'est une autre forme
d'invasion. Mais dont les conséquence sont identiques. C'est un
processus qui aura des conséquences très graves, il n'y a pas à
discuter là-dessus. Et sur tous les plans: en littérature... dans
tout! Prenez le métro à dix heures du soir dans la direction de
Clignancourt, surtout le vendredi, le samedi soir. C'est une autre
humanité. Elle n'a plus rien à voir avec la France. [...]

L'entretien date de 1979.

L'imbécile de janvier 2005
N°8
l'Imbécile

Cioran parle - Entretien exclusif



Un entretien exclusif avec le plus secret des écrivains français




Par son silence, il a laissé se développer autour de lui des réputations fantaisistes: "nihiliste", "masochiste désespéré", "démolisseur d'illusions". Il vient de publier un essai, "Excercices d'admiration" " (Gallimard), qui sera suivi dans le courant de l'année d'"Aveux et anathèmes" (Gallimard).

Une aubaine puisque le plus secret des grands écrivains de langue française refuse de se dévoiler hors de ses livres. Il déteste les entretiens, fuit la presse...et préfère qu'on lise les propos qui suivent comme le fruit d'un entretien amical. Sans les traduire ni les interpréter.

Comme sa réputation ne l'indique pas, Cioran est un homme d'une grande gaieté et d'une exquise courtoisie. Lui qui vous exécute Dieu et création dans un aphorisme de deux lignes, vous ouvre, à deux pas de l'Odèon, la porte de sa caverne à livres avec un regard malicieux et le geste empressé et hospitalier. C'est un jeune homme de soixante-dix ans (sic!), aux traits fins, aux yeux clairs, à la crinière blanche. Un lion blanc. Comme on est loup blanc. Un penseur? Un philosophe? Un écrivain , en tout cas. Il vous donne l'enivrant pressentiment qu'il se trouve ici-bas depuis le début des temps, sous des identités à peine différentes, à montres la garde devant la futilité du monde armé du seul boomerang de sa pensée qui prévoit tout, y compris la vanité de toute pensée.

Cioran n'a pas l'habitude de recevoir les journalistes. Il lui semble avoir tout dit dans ses livres. Quant aux détails autobiographiques, ils sont également contenus dans l'œuvre. De son air goguenard, suprême politesse destinée à alléger la gravité de ses propos, Cioran confesse:

- "Je crois qu'il n'y a qu'une chose qui explique et justifie les livres: leur valeur thérapeutique. Si je n'avais pas écrit, j'aurais pu faire des choses monstrueuses. Or, il vaut mieux, plutôt que de casser la geule d'un type qui vous déplaît, l'attaquer par des aphorismes. La seule fonction de l'écriture: une vengéance sans risque. On n'attaque pas seulement des personnes (d'ailleurs elles survivent à vos attaques) mais surtout Dieu. Ce sont les mauvais sentiments qui passent dans les livres. Tout ce que j'ai écrit part d'une expérience personnelle. Pour chaque ligne de mes livres, je peux dire l'événement, l'heure et le jour qui m'ont inspirée. Tout les livres ne sont que des confessions plus ou moins camouflées. Je vis l'écriture comme une action: lorsqu'on a écrit deux ou trois trucs dans lesquels on excécute l'Univers, on peut aller se promener."
Ionesco évoque souvent la stupéfaction qui s'empare de lui devant cette faculté de Cioran: se remettre à vivre plutôt joyeusement après avoir prouvé de façon irréfutable l'inanité de toute existence. La scène est celle d'une promenade commune, rive gauche. Cioran accable la Création, Dieu et ses hommes, leur prédisant une vie prochaine après une vie dénuée de sens. C'est brilliant, incontestable, définitif. Ionesco se laisse convaincre, s'attriste et sombre dans la mélancolie. Cioran considérant le sujet épuisé, se met à admirer le paysage et à échafauder des project divers. Son compagnon a généralement besoin de quelque jours pour se remettre et trouver "quelques nouvelles raisons d'espérer." Cioran ne "fait" pourtant pas dans la provocation. Il s'agit juste d'une parfaite osmose entre son être et le monde. Cioran, c'est Faust et Méphisto confondus, Jeckyll-qui-vit et Hyde-qui-écrit. C'est un sage ascétique (depuis qu'il a renoncé au café, à l'alcool et aux cigarettes, il n'écrit que des aphorismes), véritable incarnation et sanctification du doute.

Il est aussi le contraire: un étudiant incroyablement jeune par sa curiosité et son humour malicieux, un iconoclaste provocateur dans la plus pure tradition des universités allemandes, un esprit en éveil qui prend pour un affront personnel et un défi à relever la fatuité lénifiante de la moindre certitude. C'est celui qui se rit de la folie du monde parce que, dans son intégrité, il n'est jamais tombé dans le piège des vanités habituelles; c'est celui qui ne saurait espérer puisque sa clairvoyance lui révèle qu'il n'y a pas de salut.

Pour lui, l'écrivain doit renoncer à avoit une famille. Il doit aussi faire voeu de pauvreté. Il l'a fait lui-même avec une rigueur rare. Il parle avec humour de ses décennies de vaches enragées:

- "Pendant vingt ans, avec presque rien, ma substance se trouvait assurée. Je vivais dans un hôtel bon marché et je mangeais dans les restaurants universitaires. Un des jours les plus sombres de ma vie a été celui où l'on m'a convoqué à l'université pour m'annoncer que la limite d'âge pour accéder aux foyers d'étudiants était de vingt-sept ans. Comme j'en avais quarante, cétait fini. Tous mes projets, tout mon avenir, se sont écroulés ce jour-là. Je me voyais si bien en éternel étudiant, raté et pauvre, traînant avec d'autres déchets de mon espèce au quartier Latin. Cela correspondait si bien à ma vision du monde!... Je me disais: il faut tout faire sauf travailler. Par là, j'entendais: faire un travail qui ne vous plaît pas. Pour moi, c'était le bureau, l'enseignement. Je ne trouve pas que la vie vaut la peine d'être vécue s'il faut acomplir un travail qui ne vous intéresse pas. Et pourtant, quatre-vingt dix-neuf pour cent des gens font des choses qu'ils n'aiment pas. La vie ainsi vécue n'a aucun sens. Elle condamne le monde, la société et l'homme. Si c'est pour en arriver là, il valait mieux rester à l'état de nature."
Et Cioran d'évoquer Dostoïevski qui a accepté d'être pauvre et sans famille. Le plus grand de tous avec Shakespeare qui a sur lui "l'avantage d'être poète et d'écrire en anglais". Les deux écrivains qui sont arrivés jusqu'aux dernières limites de l'expérience humaine. Plus loin, il n'y a que le vertige.

- "Après Shakespeare, on aurait dû arréter d'écrire des pièces de théâtre et apres Dostoïevski, arrêter d'écrire des romans. Mais l'homme est condamné: il ne peut qu'avancer et se briser. Je peux signer cela devant notaire. Je sais que l'avenir nous condamne. Je ne donnerai pas de délai car je ne veux pas me compromettre. Pour la date, j'hésite, pour la chose: non!"

Les entretiens que Cioran accorde sont rarissimes. Il s'interdit l'une des plus fréquentes illusions de notre temps: se prendre au sérieux avec la complicité des médias. Si ce refus profite à l'œuvre, il laisse dans l'ombre les qualités humaines de l'écrivain. Parce qu'on ne peut pas imaginer la chaleur de Cioran, l'entretien qui se prolonge pendant des heures, son hospitalité qui concilie l'élégance et la simplicité. Cioran qui vous offre de l'eau-de-vie roumaine. Cioran qui, vif comme un lutin, vous déniche, sans regarder, dans ses montagnes de livres une minuscule brochure. Cioran, enfin, qui vous parle plus volontiers d'autres que de lui. Son dernier livre s'intitule justement Exercices d'admiration. Des pages dédiées à Beckett, Joseph de Maistre, Valéry, Saint-John Perse, Michaux. Le second livre (qui paraîtra également cette année chez Gallimard) est un florilège d'aphorismes intitulé Aveux et anathèmes. Une double nature s'y confirme; pour l'humanité l'anathème, pour l'individu, parfois, miraculeusement: l'admiration.

Un autre sortilège dont on devient conscient en rencontrant Cioran, c'est la perfection de sa langue. Dès qu'il exprime une idée, il le fait avec une si diabolique exactitude que vous en êtes prisonnier. On est tenu de le citer au mot près:

- "J'ai le complexe de l'étranger: je sais que je ne peux pas me permettre toutes les audaces, les oublis et les violences en français. Toutes ces choses que l'on fait naturellement, d'instinct, dans sa langue, on en est conscient dans une langue étrangère, même si on la possède parfaitement. On reste toujours conscient du fait que les mots existent indépendamment de vous. Cet intervalle entre vous et l'instrument-verbe est la raison pour laquelle il y a très peu, presque pas de poètes écrivant dans une autre langue que leur langue maternelle. Le Rilke des Cahiers de Malte voulait à tout prix être un poète français. Il connaissait très bien la langue mais son pari était impossible. En tant que poète, Rilke n'existe pas par ses poèmes français. Il y a un côté puéril, il y a cet intervalle entre le sujet et l'écriture. Lorsque les mots existent en dehors de vous, il est impossible de faire de la poésie avec. La poésie est en vous. Un métèque doit être conscient que, dans sa nouvelle langue, il ne peut pas exprimer cette mort souterraine de l'âme qu'est la poésie. On peut devenir poète dans une langue qu'on apprends à cinq ans. Ensuite, c'est trop tard."

Pour Cioran, la limite la plus audacieuse que peut atteindre un écrivain dans une nouvelle langue est l'ironie. Il ne s'en prive pas. Avec une persévérance qui fait croire que l'ironie n'est que le déguisement poli d'un désespoir si profond qu'il sombrerait autrement dans le grotesque: "L'ironie, c'est le vice de la nuance." Une fois de plus, Cioran sacrifie à sa double nature: admirant les Grecs anciens, passés maîtres dans le domaine, les seuls à avoir été ironistes et penseurs et admettant en même tamps que la philosophie hindoue, la plus grande, celle qui aborde tous les grands problèmes, manque totalement d'humour.

Connaître Cioran après l'avoir lu confirme une hypothèse: il existe un prototype de sage occidental. Avec sa double nature qu'il qualifie lui-même d'emballée et déçue, tel ce Bouddha auquel il est venu par déception et qu'il ne peut pas suivre par faculté d'être déçu. Il a eu son désert, ses déserts. A plus d'un tournant, le français a failli perdre cet écrivain formidable et Cioran a failli rater le français auquel il voue un véritable culte.

Pour commencer, il est né à Rasinari, en Transylvanie. On y parlait le hongrois, l'allemand et le roumain mais guère le français. A dix-sept ans, l'écrivain arrive à Bucarest pour y mener des études de philosophie. Il découvre un nouvel univers: tout le monde parle français. En société, le sujet de conversation favori, c'est le dernier roman paru à Paris. Evidemment, tout le monde l'a lu en original:

- "L'importance du français dans la Roumanie d'avant-guerre est à peine imaginable; il y avait trente librairies françaises à Bucarest et un grand quotidien rédigé en cette langue. Dans l'exportation des ouvrages en français, la Roumanie venait en deuxième position, juste après la Belgique."

Pour le jeune Cioran c'était un bouleversement. Il venait de quitter Sibiu (connu également sous le nom d'Hermannstadt), centre de culture allemande, très important, où il avait surtout fait connaissance avec la philosophie. Plus tard, seulement, il s'intéressa à la poésie, à la littérature et à la mystique.

- "La philosophie a été pour moi une grande déception. Je ne l'ai compris qu'après m'y être totalement confiné pendant des années. C'est une discipline dangereuse car le contact avec elle engendre un mépris totale pour tous ceux qui sont en dehors. Ceux qui la pratiquent, étudiants et professeurs, sont le plus souvant des types
prétentieux. La philosophie flatte l'orgueil; elle vous donne une idée fausse de vous et du monde. Il faut l'avoir connue mais uniquement pour la dépasser. Elle vous ouvre des horizons mais ce qui compte avant tous c'est le contact avec la vie, les épreuves. La philosophie ne vous aide, au mieux, qu'à formuler. Le langage philisophique est peu approprié aux experiences strictement personnelles. En philosophie par exemple la douleur n'est pas admise. On laisse "ça" aux curés et aux mauvais écrivains."

Parmi ses expériences personnelles, Cioran place au premier plan la perte du sommeil. Il s'en excuse avec un sourire: il est conscient de mettre ses insomnies partout mais il s'agit d'une expérience essentiele. La perte du sommeil lui a fait réaliser la continuité tragique, hallucinante, du temps, entraînant un sentiment de non-appartenance au monde. Pendant ces nuits blanches, il a eu la révélation de l'inutilité de la philosophie. Il se promenait seul dans les rues de Sibiu:

- "Il n'y avait dans sa ville que les putains et moi. Depuis, je leur voue un grand respect. Nous veillions ensemble sur le sommeil des autres. Pour moi, c'était une époque tragique. J'avais fini mes études mais je n'étais bon à rien. J'ai enseigné la philo pendant une année. Après mes nuits blanches, j'allais au lycée de mauvaise humeur et je proférais des insanités. Je tournais tout au ridicule. Deux ou trois élèves suivaient. Les autres ricanaient. Je ne voyais pas du tout ce que j'allais devenir."

Fort opportunément, une bourse de L'institut français de Bucarest lui permet de partir pour Paris. Cioran avait déjà publié cinq livres en roumain dont Le crépuscule des pensées, qu'il considère comme la préhistoire de sa création, sa première incarnation. Dès son arrivée à Paris, en 1937, Cioran disposait d'un alibi: écrire une thèse. Imposture. Pendant dix ans, il n'a pas cherché un seul sujet, persuadé qu'il ne serait jamais capable d'écrire en français.

Sa bourse lui permettant de vivre, il se met (étrangement) à étudier l'anglais. Pendant l'Occupation, il fréquente la Bibliothèque américaine restée (curieusement) ouverte. Et il suit les cours de l'agrégation.

- "Dans ma mémoire, le temps sinistre de l'Occupation représente la formidable rencontre avec les poètes anglais. Je lisais avec mon dictionnaire anglo-roumain, une antiquité introuvable publiée en 1880 à Bucarest, les Lessen Poets, les poètes mineurs anglais qui feraient les très grands poètes de toute autre langue..."

En 1947, événement inattendu. Dans un village près de Dieppe, où, pour s'amuser, il s'exerce à traduire Mallarme en roumain, il prend soudain conscience qu'il ne quittera plus la France et qu'il lui faut désormais écrire en français. Un véritable réveil mystique. Il rentre immédiatement à Paris et rédige dans la foulée la première version de Précis de décomposition initulé à l'époque Exercice négatif. Cioran a trente-sept ans. Le manuscrit, envoyé chez Gallimard est aussitôt accepté par Raymond Queneau. Cioran fait lire le texte à un ami. Verdict : "ça sent le métèque." Verdict qui le décide à réécrire le livre. Il le fera trois fois et s'emploie jour et nuit, à pénétrer les secrets du français. Pour y arriver, il renonce complètement au roumain. Il comprend qu'il est dans la bonne voie quand, dans ses rêves, il entend son père lui parler français.

- "Changer de langue pour un écrivain est une phénomène aussi grave que pour un homme de changer de religion, disait Simonne Weil. L'écrivain retire l'illusion d'une nouvelle vie, d'un nouvel univers. Je suis formel: si un écrivain étranger (j'entends par là uniquement ceux qui ont déjà publié dans une autre langue, qui ont eu une première carrière d'écrivain) veut se mettre au français, il lui faut complètement écarter la langue maternelle. On me dit parfois: "Mais ma femme veut parler dans notre langue." Je réponds: "Un seul remède: le divorce."
Pendant cette étude "obsessionelle" du français, Cioran rencontra un personnage surprenant: un Français, très aisé, qui n'avait jamais travaillé de sa vie, grand connaisseur de la langue basque sur laquelle il publiait de temps à autre un article. Ce mutilé de la Première Guerre mondiale, étrange et cultivé, qui parlait la langue écrite du XVIIIe siècle, avait suivi les cours de Bergson, et entretenait, après le basque, une seule passion: la langue française.

- "Au bordel, il reprenait les putains qui faisaient des erreurs de concordance des temps. Il hurlait quand on n'employait pas correctement l'imparfait du subjonctif. Je lui posais toujours des questions quand j'avais des dificultés avec mon manuscrit. Un jour, je l'ai invité dans un café du quartier Latin pour lui lire quelques pages du Précis. Il s'est endormi à la première. Cela m'a fichu un terrible cafard. Il a pourtant eu une grande influence sur moi: il avait la passion du mot, l'obsession de la pureté de la langue. Il était un example de cette formidable passion qui a toujours existé entre le Français et sa langue. Un des derniers représentants de la langue vénérée comme absolu. Ce type avait le vice de la langue. Il vivait pour le français."
Et Cioran, qui annonce avec un sourire détaché la fin des hommes, de s'assombrir en évoquant le crépuscule du français et la disparition de cette bourgeoisie cultivée qui assurait la transmission de la langue un peu partout dans le monde. Il enchaîne en citant Erwin Chargaff, ce nobélisable de Czernowics, ville de Celan, petite localité de Bucovine et en même temps formidable centre de culture allemande.

- "Chargaff disait: "Ne mérite d'exister que ce qui est exprimé en français." C'était un personnage intéressant. Je le citais dans un article publié dans la NRF et je vais lui dédier un chapitre de mon prochain livre. Je trouve qu'écrire à l'infini n'a pas de sens. De chaque livre, il ne subsiste que quelques lignes. Alors, à quoi bon de multiplier les livres? Mais comme je n'avais rien à faire, j'ai écrit ce livre. Faut bien faire semblant de se remuer un peu. Avec l'âge, on devient fatigué. Et moi, j'ai toujours été un peu las."
Cioran évoque à propos de Michaux, la race des fatigués-nés. Sans s'y inclure. Qu'est-il celui que la pudeur empêche de se définir? Un déçu-né? Un désespéré-né? Il se dit en proie au cafard métaphysique, ce cafard sans raison qui n'est au fond que l'affection de tous les mortels lucides. Tous ses actes en sont marqués et pourtant son gai désespoir est communicatif et généreux.

- "On me dit souvant: "Malgré ce que vous écrivez, vous êtes un des hommes le plus gais." J'ai beaucoup ri en effet dans ma vie mais cela ne prouve rien. Rire est un acte libérateur. Je viens de recevoir une lettre de Roumanie. D'un ami qui pense au suicide. Il me demande conseil. Je lui ai répondu: "si tu ne peux plus rire, fais-le!" Le rire c'est un acte de supériorité, un triomphe de l'homme sur l'univers, une merveilleuse trouvaille qui réduit les choses à leurs justes proportions."
Il a fallu de l'humour à Cioran pour supporter toutes les années de misère où, solitaire et indomptable, il édifiait son œuvre. Le Précis de décomposition, paru en 1949, fit un certain bruit.

- "On en parle quelque mois. Le deuxième livre, Syllogismes de l'amertume fut publié par Gallimard à contre-coeur. Ce fut un échec absolu, un livre mort-né qui ne s'est pas vendu pendant vingt ans. Ce qui m'étonne encore; c'était pourtant un livre très bon marché. Mes amis me faisaient la leçon: "Ce n'est pas un livre serieux, il va vous compromettre." J'ai rencontré un jour un ami philosophe dans la rue. Il me l'a dit vertement: "Ce livre est indigne de vous." Moi, je n'étais pas si sûr... La suite de l'histoire est intéressante, surtout pour les jeunes. En Allemagne, le directeur littéraire de Rowohlt qui devait publier les Syllogismes, les a qualifiés de "fonds de tiroir". Furieux, il a renvoyé son contrat à Gallimard, précisant qu'il ne voulait plus rien publier de moi. Le Précis de décomposition avait déjà été un échec en Allemagne. Vingt articles. Tous mauvais. Vingt ans après, on l'a publié en livre de poche. Ce fut un succès immédiat. Grâce surtout aux jeunes lecteurs. C'est uniquement depuis cette réédition qu'on parle de moi. Mes premiers lecteurs ont été des lycéens. C'est une tendance qui ne s'est pas démentie depuis. J'ai rencontré certains de mes lecteurs. Leurs professeurs les avaient pourtant mis en garde: tout ce que j'écrivais était superficiel. En Allemagne comme en France il y a eu ce même phénomène: l'écho est venu vingt ans après grâce aux jeunes. C'est un phénomène de génération. On a d'ailleurs souvent dit que mon public, c'était la jeunesse désaxée."
A l'heure de quitter Cioran, les bras chargés de livres (car jamais il ne vous laisserait partir sans un exemplaire des textes dont il vous a parlé et que vous ne connaissez pas encore), on s'ennuie déjà de lui. De cette sérénité relative qui est pour d'autres un triomphe mais qui n'est pour lui qu'un "calvaire réussi".

Entretien avec Anca Visdei
Les Nouvelles Littéraires, 02/1986

Gevierendeeld: Zwart en stralend

Cioran : een duister denker. Wie hem voor het eerst leest, weet niet of hij hem ernstig moet nemen. Want wat doe je bij een eerste lezing met een gedachte als

"de dood is het degelijkste dat het leven tot nog toe heeft uitgevonden"?

Zoals in zijn andere werken, brengt Cioran ook in zijn Ecartélement, zijn sombere, pessimistische nihilisme tot uitdrukking. "De grootste prestatie van mijn leven is dat ik nog in leven ben."

En : "Als men feilloos waarnam wat men is, dan had men nog net het hart om te gaan liggen, maar zeker niet om op te staan."

Dit is een meditatieboek vol (soms glanzende) aforismen die men even aandachtig en bedachtzaam dient te lezen als de Pensées van Pascal. Men houdt ervan, of men houdt ze ver van zich.


Naast die aforismen, ook een even intelligente als kontroversiële filosofie van de geschiedenis, en gedachten over verdraagzaamheid die elk konformistisch lezer waarschijnlijk doen kokhalzen : over de beschaafden die, uit zwakheid, de verdraagzaamheid hebben uitgevonden, en daaraan te gronde zullen gaan; de verdraagzaamheid als koketterie van stervenden.

De vertaling is zeer goed maar toch vond ik er dat typische Cioran-aksent van de oorspronkelijke teksten niet in terug : dat vreemde aksent van een Roemeen die op latere leeftijd (feilloos) Frans leerde, en dat zo eigen en zo onvertaalbaar is.

Paul Janssen
Emile M. Cioran, Gevierendeeld, De Arbeiderspers, Amsterdam, 1995, 163 pag.
ISBN 90-295-1025-0

Verscheen in TeKoS (Teksten, Kommentaren en Studies), nr.85, 1997

Entretien avec Aurel Cioran

Mutti: Dans la nouvelle nomenclature des rues de Bucarest, on trouve aujourd'hui le nom de Mircea Eliade, mais à Sibiu, il n'y a pas encore de rue portant le nom d'Emil Cioran. Que représente Cioran pour ses concitoyens de Sibiu à l'heure actuelle?

Aurel Cioran: Donner un nom à une rue ou à une place dépend des autorités municipales. Normalement, il faut qu'un peu de temps passe après la mort d'une personnalité pour que son nom entre dans la toponymie. Quant à ce qui concerne les habitants de Sibiu et en particulier les intellectuels locaux, ils ne seront pas en mesure de donner une réponse précise à votre question.

Mutti: Je vais vous la formuler autrement. Dans une ville où il y a une faculté de théologie, comment est accueilli un penseur aussi négativiste (du moins en apparence...) que votre frère?

Aurel Cioran: Vous avez bien fait d'ajouter "en apparence". Dans un passage où il parle de lui-même à la troisième personne et qui a été publié pour la première fois dans les "Œuvres complètes" de Gallimard, mon frère parle très exactement du "paradoxe d'une pensée en apparence négative". Il écrit: "Nous sommes en présence d'une oeuvre à la fois religieuse et antireligieuse où s'exprime une sensibilité mystique". En effet, je considère qu'il est totu-à-fait absurde de coller l'étiquette d'"athée" sur le dos de mon frère, comme on l'a fait depuis tant d'années. Mon frère parle de Dieu sur chacune des pages qu'il a écrites, avec les accents d'un véritable mystique original. C'est justement sur ce thème que je suis intervenu lors d'un symposium qui a eu lieu ici à Sibiu. Je vais vous citer un autre passage qui remonte à 1990 et qui a été publié en roumain dans la revue Agorà: "Personnellement, je crois que la religion va beaucoup plus en profondeur que toute autre forme de réflexion émanant de l'esprit humain et que la vraie vision de la vie est la vision religieuse. L'homme qui n'est pas passé par le filtre de la religion et qui n'a jamais connu la tentation religieuse est un homme vide. Pour moi, l'histoire universelle équivaut au déploiement du péché originel et c'est de ce côté-là que je me sens le plus proche de la religion".

Mutti: Parlons un peu des rapports entre Emil Cioran et les lieux de son enfance et de sa jeunesse. Vous demandait-il de lui parler de Rasinari et de Sibiu?

Aurel Cioran: Il se souvenait de choses que moi j'avais complètement oubliées. Un jour, il m'a dit au téléphone: "Je vois chaque pierre des rues de Rasinari". Pendant toute sa vie, il a conservé en son fors intérieur les images avec lesquelles il a quitté la Roumanie.

Mutti: Il n'a jamais manifesté le désir de revenir?
Aurel Cioran: Quand nous nous sommes séparés en 1937, il m'a dit, en avalant sa salive, dans le train: "Qui sait quand nous nous reverrons". Et nous ne nous sommes revus que quarante ans plus tard, mais pas dans notre pays. Il a toujours désiré revenir. En 1991, il a été sur le point de s'embarquer pour la Roumanie. C'est alors que la maladie l'a frappé, qu'il a dû rentrer à l'hôpital. Dans ces derniers moments, il a été contraint d'utiliser une chaise roulante. Il craignait forcément de voir une réalité toute autre, s'il était revenu. Et effectivement il y a eu beaucoup de changements; à Rasinari, la composition sociale a complètement changé: quasi la moitié des habitants du village travaillent à la ville, ce qui conduit forcément à un changement de mentalité. Tout est bien différent du temps où nous étions adolescents. A Rasinari, nous étions des gamins de rue, nous allions en vadrouille toute la journée à travers champs, forêts et rivières...


Mutti: ... et à Coasta Boacii.

Aurel Cioran: Oui, en effet, il évoquait sans cesse, avec énormément de regrets, ce paradis qu'était Coasta Boacii. "A quoi bon avoir quitté Coasta Boacii?", disait-il. Ensuite, il y avait ce pacage, près de Paltinis, où nous nous rendions tous les étés. Nous y restions un mois, dans une baraque tellement primitive, située dans une clairière où régnait une atmosphère extraordinaire.

Mutti: Vous avez été très proche de votre frère non seulement dans les années d'enfance mais aussi pendant votre adolescence et votre jeunesse. Parlez-moi de vos expériences communes...
Aurel Cioran: Nous assistions aux cours de Nae Ionescu à l'Université. Ce professeur était une figure extraordinaire! Beaucoup de gens venaient l'écouter et pas seulement des étudiants. Mon frère y retournait même après avoir quitté l'université, pour rendre visite au professeur. Un jour, dès que la leçon fut terminée, Nae Ionescu a demandé: "De quelles choses devrais-je encore parler?". Et mon frère, spontanément lui a répondu: "De l'ennui". Alors Nae Ionescu a prononcé deux leçons sur l'ennui. Par la suite, ses adversaires ne sachant plus quelles armes utiliser pour l'attaquer, parce qu'il était le maître à penser de toute la jeune génération d'intellectuels qui soutenaient le "Mouvement Légionnaire", ils l'ont accusé d'être... un plagiaire! Ce genre d'attaques est une manifestation infernale... L'oeuvre d'une mafia de criminels, qui a commencé par s'attaquer à Heidegger, puis à chercher à faire le procès d'Eliade...

Mutti: ... et même de Dumézil!

Aurel Cioran: Toujours sous prétexte d'antisémitisme. En Roumanie, à l'époque, il y avait bien sûr de l'antisémitisme, en réaction à l'arrivée massive d'un million de juifs venus de Galicie. En ce temps-là, c'était un véritable problème. Mais j'ai l'impression que cette manoeuvre visant à criminaliser Eliade, Noica et les autres intellectuels de la "jeune génération" produira des effets contraires à ceux désirés.

Mutti: Vous avez milité dans le Mouvement Légionnaire. Avez-vous connu Corneliu Codreanu?
Aurel Cioran: C'était un homme exceptionnel à tous points de vue. Il avait du charisme. J'ai souvent dit qu'il était un trop grand homme pour le peuple roumain, trop sérieux, trop grave. Il voulait une réforme radicale, basée sur la religion. Il était un esprit très intensément religieux. Il y a encore une chose qui m'impressionne profondément aujourd'hui: la manière dont le Mouvement Légionnaire abordait les problèmes économiques. Le Mouvement avait ouvert des restaurants, des réfectoires, où l'on vous servait un très bon repas, avec du vin en quantité limitée. L'idée qui me paraissait extraordinaire, c'est que les prix n'étaient pas fixés. Chacun payait selon ses propres moyens ou selon son bon plaisir.

Mutti: Où avez-vous connu le Capitaine?
Aurel Cioran: A Bucarest, parce que j'y étudiait la jurisprudence. Mais je l'ai rencontré deux ou trois fois dans un camp de travail légionnaire. C'était un homme exceptionnel à tous points de vue.

Propos recueillis à Sibiu le 3 août 1995 par Claudio Mutti et parus dans la revue Origini, n°13/février 1996

Cioran - Der Ketzer

Ein biographischer Essay (Gebundene Ausgabe)
von Patrice Bollon, Ferdinand Leopold

Kurzbeschreibung
Um Ciorans facettenreich geschliffenes, unruhig funkelndes Aphorismenwerk ist es still geworden. Spätestens seit dem Tod des Autors vor zehn Jahren, am 20. Juni 1995, droht die Auseinandersetzung mit den antisemitischen und hitlerfreundlichen Äußerungen des jungen Cioran die mit dem Werk zu überschatten. Patrice Bollons biographischer Essay über den »Ketzer« setzt an genau diesem Punkt ein. Statt Ciorans Jugendblindheit abzudrängen, zeigt Bollon, in welcher kulturellen und politischen Landschaft die frühen Artikel sowie jene verhängnisvolle Schrift über die »Verklärung Rumäniens« entstanden und wie Cioran sich in einer lebenslangen Auseinandersetzung mit ebendiesem Irrtum von den »blutigen Possen« der Utopie und von jedem Glauben zu befreien suchte – und so zu dem wurde, der er schließlich war: ein Meister der Klarheit, der Eleganz und der Gelassenheit. Bollons fundiertes, fesselnd geschriebenes Porträt bietet die beste Einführung in Leben und Werk Ciorans, der, am 8. April 1911 im rumänischen Rasinari als Sohn eines Popen geboren, 1937 nach Paris übersiedelte. Anknüpfend an die Tradition der französischen Moralisten, verarbeitete er die eigenen überschwenglichen Anfänge und Abgründe und wurde zu einem der bedeutenden Schriftsteller und Stilisten der französischen Sprache.

Ein vollendeter Pessimist
Patrice Bollons kenntnisreiche Studie über den Philosophen E.M. Cioran
Hans-Jürgen Heinrichs

Der Ketzer - Amazon Deutschland

Zersplitternde Gewißheiten

von Emile M. Cioran, Thomas Stölzel, Simone Stölzel

Kurzbeschreibung
Eine übersichtlich knappe, thematisch gegliederte, jeweils mit kurzen Einleitungen versehene Auswahl aus den Aphorismen und Essays, die das Lesebuch von Thomas und Simone Stölzel präsentiert, lädt zu einer ersten Bekanntschaft mit dem Werk des 1911 in Siebenbürgen geborenen und 1995 in Paris gestorbenen rumänischen Aphoristikers »auf den Gipfeln der Verzweiflung« - wie einer seiner Bände heißt - ein. »Meine Feigheit vorm Leben ist angeboren. Stets graute mir vor jeder Verantwortung, jeder Aufgabe - instinktive Abscheu vor allem, was mich nicht unmittelbar anging. Das Gegenteil von einem >Anführer<. Und wenn ich als junger Mensch oftmals Gott beneidete, war es nicht vielleicht darum, weil mir Gott, der über allem stand, als verantwortungslos schlechthin erschien?«

Autorenporträt Thomas Stölzel, geb.1964 in Nürnberg. Lebt in Freiburg. Studium der Germanistik, Philosophie und Geschichte. Dozent für Philosophie in der Erwachsenenbildung, Ausbildung und Mitarbeit in Systemischer Therapie. Veröffentlichte verschiedene Aufsätze, u.a. über Paul Valery, Dissertation 1998: "Rohe und polierte Gedanken. Studien zur Wirkungsweise aphoristischer Texte."
Broschiert: 187 Seiten
Verlag: Suhrkamp
Auflage: 1 (Juli 2002)
Sprache: Deutsch
ISBN: 3518397788

T. und S.Stölzel


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Um nichts in der Welt - Eine Liebe von Cioran

von Friedgard Thoma
Gebundene Ausgabe
Verlag: Weidle Verlag (2001)
ISBN: 3931135608

Kurzbeschreibung
Wenige Wochen später fuhr die junge Frau nach Paris, und es entstand eine Liebe und Freundschaft, die bis zu Ciorans Tod andauerte und in die später auch seine Lebensgefährtin eingebunden war. Mit ihr und Cioran verbrachte die Autorin 1981 zwei Wochen in Soglio, gemeinsam mit Freunden, darunter Hermann Burger. Später traf man sich zumeist in Paris, zuletzt besuchte sie Cioran in dem Heim, in dem er seinem Tod entgegendämmerte. Friedgard Thoma schildert ihr Verhältnis zu Cioran unter Einschluß des stets auf deutsch geschriebenen Briefwechsels der beiden. Es entspinnt sich die alte und immer wieder neue Geschichte vom alten Mann und dem schönen Mädchen: Sie liebt den Geist des alten Philosophen und er die Vitalität und Schönheit der jungen Frau. Nur wird die Geschichte hier ausnahmsweise vom "schönen Mädchen" erzählt, was ihr eine neue Dimension abgewinnt. Man bekommt ein Stück von jener "Lebensmechanik" zu fassen, die solche Beziehungen lenkt, und erfährt manch Überraschendes aus dem Leben eines Philosophen, der nicht unbedingt für seine Lebensfreude bekannt ist.

..."Als mir Cioran 1989 die deutsche Übersetzung seines rumänischen Erstlingswerk Auf den Gipfeln der Verzweiflung schickte, schrieb er in ein klein wenig fehlerhaften Deutsch hinein: Hatte ich nicht in meiner Jugend dies Geheuel produziert, seit lange hätte ich die Bühne verlassen. Da er sie nicht verlassen hatte, blieb er immerfort mit der Todeswunde auf der Bühne liegen und heulte - aber er hat einen Gesang daraus gemacht..."...

Ein verführbarer Skeptiker
Amine Haase

Liebe - was immer darunter zu verstehen ist
Susanne Gabriel

Vom Glück bedroht

Friedgard Thoma: Um nichts in der Welt. Eine Liebe von Cioran
Max Lorenzen

Cioran und Thoma - alter Mann und junge Frau - Ein E-Mail-Disput zwischen Verleger und Kritiker
Stefan Weidle und Frank Müller

Eitle Gedankenkosmetik - E. M. Cioran und Friedgard Thoma
Frank Müller

Letzte Liebe - Friedgard Thoma
Arno Widmann




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Unheiliger Cioran

Unheiliger Cioran
Ein kritischer Versuch von Thomas Stölzel

«Begegnungen mit E. M. Cioran» – so lautet der vielversprechende Untertitel zu einem unlängst erschienenen Büchlein über den rumänisch-französischen Aphoristiker und Essayisten, der eigentlich Emilian M. Cioranescu hiess und sich selbst, als Autor, auf den prekären Status eines «Säulenheiligen ohne Säule» festlegte. – Die zwei Begegnungen, von denen der deutsche Philosoph Thomas Stölzel berichten kann, fanden im Sommer 1992 in Paris statt; sie beschränkten sich auf einen knappen Wortwechsel – par hasard – in einer Buchhandlung und auf ein eher banales Tischgespräch in Ciorans damaliger Wohnung. Die Rekapitulation der Gespräche benötigt denn auch, naturgemäss, nur ein paar wenige Druckseiten, und was Stölzel im weitern mit aufwendiger Rhetorik vor dem Leser ausbreitet, ist nicht viel mehr als eine kommentierte Zitatcollage aus andern Gesprächen, die Cioran mit andern Partnern geführt hat (und die alle bereits auch in deutscher Übersetzung greifbar sind), angereichert durch kurze Werkauszüge, anhand deren insbesondere die persönliche Integrität des Autors kritisch überprüft, bisweilen auch in Zweifel gezogen wird.

Ständig schwankend zwischen Bewunderung und dezidierter Abneigung, reiht Stölzel seine Paragraphen aneinander – biographische Momentaufnahmen und physiognomische Fragmente, Hinweise auf Themen und Motive, auf literarische Formen und Verfahren, auf philosophische Quellen und Einflüsse, nicht zuletzt auch auf Widersprüche zwischen Werk und Leben, zwischen Form und Inhalt, jedoch ohne den Widerspruch als provokative Denkfigur zu reflektieren oder weiterzudenken. Es bleibt bei der Aufzählung und Deskription längst bekannter Tatsachen, um nicht zu sagen – Gemeinplätze. Das meiste wird bloss angetippt, mit Lob oder Tadel abgefertigt, dann abgehakt; eine «Begegnung», die als Auseinandersetzung für den Leser von Interesse wäre, findet nicht statt. Da Ciorans Text durchweg als ein Dokument autotherapeutischer Schreibarbeit verstanden, mithin missverstanden wird, vermag er letztlich nicht über sich selbst hinauszuweisen, verflacht zum narzisstischen Monolog. Stölzel bleibt dabei: «Was Cioran mit seinem karpatisch-kathartischen Schreib- und Denkstil an sich betrieb und vorführte, könnte man auch als eine höchst eigenwillige Form der Autopsychoanalyse bezeichnen.» Und demzufolge wird nicht der Text als das gelesen, was dasteht, vielmehr der Autor als der, der im Text sich widerspiegelt.

Durchaus diskutabel sind im übrigen Stölzels kritische Hinweise auf metaphysischen Schwulst und metaphorischen Kitsch beim jungen Cioran, auf seinen «misogynen Extremismus» und andere reaktionäre Konstanten seines Denkens. Den bekannten Vorwurf, wonach Cioran mit dem Nationalsozialismus sympathisiert habe und vorübergehend gar als «Barde des Führers» publizistisch tätig gewesen sei, greift auch Stölzel andeutungsweise auf, ohne dazu irgendwelche neuen Erkenntnisse oder Belege beizubringen. Dass der einzelgängerische «Karpaten-Buddhist» auch damals noch unter dem bestimmenden Einfluss des russisch-jüdischen Philosophen Lew Schestow stand, bleibt ebenso unerwähnt wie seine frühe literarische Prägung durch Wassili Rosanow.

Der «Säulenheilige ohne Säule» wird in Stölzels Darstellung wohl etwas vorschnell auf die unheilige Existenzform eines misanthropischen Zweckpessimisten redimensioniert, und zu offenkundig ist die Tendenz des Autors, bei Cioran das Werk am Leben, den Stil an der Person zu messen und dieses inadäquate Verfahren auch noch zur Grundlage entsprechender Wertungen zu machen. «Wenn Cioran Entsprechendes, so oder ähnlich, erlebt hat, dann ist er eigentlich noch stärker als der Leser zu bedauern, denn dieser kann sich – denn wer könnte hier verweilen? – wenigstens abwenden.» So verquält wie dieser unsägliche Satz ist Stölzels Verhältnis zu Cioran insgesamt, seine Begegnung, sein Gespräch mit ihm – ein acte gratuit.

Felix Philipp Ingold
Neue Zürcher Zeitung

Ein Säulenheiliger ohne Säule

von Thomas Stölzel

Kurzbeschreibung
"Bevor die Furie des Verschwindens auch den letzten großen Anti-Systematiker des französischen Denkens unter ihre Räder gebracht hat, erinnert ein kleines, sehr lesenswertes Buch an E. M. Cioran." (Michael Krüger in Die Woche)Thomas Stölzel hat - nach einem zufälligen Aufeinandertreffen auf der Straße - Emile Cioran einige Male in dessen letzten Jahren besucht. Seine Schilderungen dieser Begegnungen und Gespräche sind ein ebenso stimmungsvolles wie genaues Porträt der Stadt und ihres Bewohners: der deutsche Besucher registriert ein bestimmtes intellektuelles Klima in Paris, vor dem und in dem sich die Persönlichkeit des rumänischen Philosophen und Dichters erst richtig entfaltet. In Cafes und in seiner Wohnung in der Rue de l'Odeon spricht Cioran über Celan, über seine Bücher, über Frankreich, das "Balkanesische", und in all dem entsteht das lebendige Bild eines bemerkenswerten, widersprüchlichen und faszinierenden Geistes. "Kann man Cioran etwas Schlimmeres antun als ihn verstehen (begreifen, erklären) zu wollen? Schwerlich. Er selbst hielt das vermeintlich erfolgreiche Bemühen um Verständnis für das Schlimmste, was einem Autor widerfahren könne." Stölzel erspart sich, seinen Lesern und Cioran dieses Unglück und beschreibt die Geschichte der Etikettierungen, mit denen man Cioran im Lauf der Jahrzehnte versehen hat, mit mildem Spott - und läßt im übrigen den Dichter-Philosophen selbst zu Wort kommen.Thomas Stölzel, geb.1964 in Nürnberg. Lebt in Freiburg. Studium der Germanistik, Philosophie und Geschichte. Dozent für Philosophie in der Erwachsenenbildung, Ausbildung und Mitarbeit in Systemischer Therapie. Veröffentlichte verschiedene Aufsätze, u.a. über Paul Valery, Dissertation 1998: "Rohe und polierte Gedanken. Studien zur Wirkungsweise aphoristischer Texte."

Autorenportrait
Thomas Stölzel, geb.1964 in Nürnberg. Lebt in Freiburg. Studium der Germanistik, Philosophie und Geschichte. Dozent für Philosophie in der Erwachsenenbildung, Ausbildung und Mitarbeit in Systemischer Therapie. Veröffentlichte verschiedene Aufsätze, u.a. über Paul Valery, Dissertation 1998: "Rohe und polierte Gedanken. Studien zur Wirkungsweise aphoristischer Texte."

"Bevor die Furie des Verschwindens auch den letzten großen Anti-Systematiker des französischen Denkens unter ihre Räder gebracht hat, erinnert ein kleines, sehr lesenswertes Buch an E. M. Cioran." (Michael Krüger in Die Woche) Thomas Stölzel hat - nach einem zufälligen Aufeinandertreffen auf der Straße - Emile Cioran einige Male in dessen letzten Jahren besucht. Seine Schilderungen dieser Begegnungen und Gespräche sind ein ebenso stimmungsvolles wie genaues Porträt der Stadt und ihres Bewohners: der deutsche Besucher registriert ein bestimmtes intellektuelles Klima in Paris, vor dem und in dem sich die Persönlichkeit des rumänischen Philosophen und Dichters erst richtig entfaltet. In Cafes und in seiner Wohnung in der Rue de l'Odeon spricht Cioran über Celan, über seine Bücher, über Frankreich, das "Balkanesische", und in all dem entsteht das lebendige Bild eines bemerkenswerten, widersprüchlichen und faszinierenden Geistes. "Kann man Cioran etwas Schlimmeres antun als ihn verstehen (begreifen, erklären) zu wollen? Schwerlich. Er selbst hielt das vermeintlich erfolgreiche Bemühen um Verständnis für das Schlimmste, was einem Autor widerfahren könne." Stölzel erspart sich, seinen Lesern und Cioran di eses Unglück undbeschreibt die Geschichte der Etikettierungen, mit denen man Cioran im Lauf der Jahrzehnte versehen hat, mit mildem Spott - und läßt im übrigen den Dichter-Philosophen selbst zu Wort kommen.

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Anstößige Denker

von Franz Wiedmann

Kurzbeschreibung
12 Portraits:
Kohelet - Joachim der Fiore - Francesco d'Assisi - Niccolo Macchiavelli - Giordano Bruno - Giambattista Vico - Henry D. Thoreau - Gustav Th. Fechner - Albert Schweitzer - Theodor Lessing - (Pierre) Teilhard de Chardin - Emile M. Cioran

Broschiert: 212 Seiten
Verlag: Königshausen & Neumann (November 1997)
Sprache: Deutsch
ISBN: 3884793691

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E. M. Cioran zur Einführung

von Richard Reschika

Neue Zürcher Zeitung
E. M. Cioran «zur Einführung»
upj. Das Denken des vor wenigen Monaten verstorbenen rumänischen Skeptikers Emile Maria Cioran hält sich in den wenigsten Fällen an die Vorgaben traditionellen Philosophierens; statt analytischer Vernunft finden sich Aphorismen und Aporien, die den in der Logik des Widersinns unerfahrenen Leser vor einige Schwierigkeiten stellen. Richard Reschika, selbst ebenfalls rumänienstämmiger Geisteswissenschafter, hat nun in der «Einführungs»-Reihe des Junius-Verlages einen kleinen Band publiziert, der nicht nur den vielfältigen Quellen von Ciorans Kulturskepsis nachgeht, sondern überhaupt eine erstaunliche Sensibilität für die Genese der Skepsis aus der religiösen Krise aufbringt. Mit Sachkenntnis werden das rumänische Frühwerk, die «negativen Ekstasen der Luzidität» – gemeint ist das Pariser Exil – und schliesslich die «Zersplitterungen» des Spätwerkes vorgestellt. Die Einführung ist geschrieben mit jenem Stil, den man füglich als denkerische Empathie bezeichnen darf.

Tages-Anzeiger, 24. April1995, S. 16
E.M. Cioran war lange Jahre hindurch ein Geheimtip. Seine grossangelegten, von radikaler und leidenschaftlicher Skepsis ebenso wie von radikalem und leidenschaftlichem Verfallensein an die Existenz getragenen Essays treffen gegenwärtig offensichtlich einen Nerv aktueller Befindlichkeit: Er ist schon fast Mode geworden.

Bei solchen Phänomenen entsteht gerne der Eindruck, sie hätten sich plötzlich, gewissermaßen aus dem Nichts, entwickelt. Doch Cioran entschied sich nicht einfach eines schönen Tages, ein faszinierender französischer Stilist zu werden; sein Entschluss hatte vielmehr eine lange Vorgeschichte. Dank Richard Reschikas »Einführung« lässt sich die Genese von Ciorans philosophisch-literarischer Persönlichkeit gut zurückverfolgen - bis hin zu seiner Jugend im Rumänien der 20er und 30er Jahre, zu einer Intellektuellengeneration in voller Gärung, zu der u.a. Ciorans Freund Mircea Eliade gehörte.

Kurzbeschreibung
Der rumänische »Privatnachdenker« und Meisterstilist E.M. Cioran (1911-1995) war der größte Skeptiker und radikalste Kulturkritiker des 20. Jahrhunderts. Ein misanthropischer Schwarzseher und notorischer Pessimist war Cioran trotzdem nicht. Sein Denken ist skeptisch noch gegenüber dem Skeptizismus, hat unterhaltsame und humoristische Züge und verortet sich jenseits von Gott und Gottlosigkeit. Aus dem rumänischen Frühwerk und den späteren französischen Schriften entwickelt Richard Reschika das Bild eines Denkers, der Mircea Eliade, Eugène Ionesco und Paul Celan zu seinen Freunden zählte und dessen Denken die Postmoderne unbeschadet überlebt hat.

Über den Autor
Richard Reschika ist freier Lektor, (Rundfunk-)Autor, Herausgeber, Übersetzer und Rezensent.
In der JUNIUS-Reihe "Zur Einführung" gibt Richard Reschika einen pointierten Überblick über das Gesamtwerk E.M. Ciorans. Vervollständigt wird die Darstellung durch eine repräsentative Auswahlbibliographie sowie eine biographische Zeittafel.
Cioran (1911-1995) ist einer der größten Skeptiker und Kulturkritiker des vergangenen Jahrhunderts. In seinem essayistisch-aphoristischen Werk erweist sich sein Denken jedoch auch als skeptisch gegenüber dem Skeptizismus, als eines jenseits von Gott und Gottlosigkeit. So hält er sich frei von allen Geschichtsutopien und gesellschaftsverändernden Theorien. Ciorans Philosophie, die aus unterschiedlichsten Quellen schöpft, hat sich in Büchern wie Lehre vom Zerfall, Syllogismen der Bitterkeit oder Die verfehlte Schöpfung niedergeschlagen. Richard Reschika entwickelt aus dem rumänischen Frühwerk und den späteren französischen Schriften das Bild eines Denkers, dessen Denken vor dem Hintergrund postmoderner Fortschrittszweifel neue Brisanz erhielt und diese Brisanz auch nach der Erschöpfung der philosophischen Postmoderne nicht eingebüßt hat.

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Ein Gespräch mit Sylvie Jaudeau

Gespräch mit Sylvie Jaudeau
von Emile M Cioran, Verena von der Heyden-Rynsch (Übersetzer)

Taschenbuch: 32 Seiten
Verlag: Erker-Galerie AG, Galerie Verlag Presse (1992)
Sprache: Deutsch
ISBN: 3905546213

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Die Philosophie der einmaligen Augenblicke

Überlegungen zu E. M. Cioran
von Rupert Guth

Broschiert: 262 Seiten
Verlag: Königshausen & Neumann (November 1997)
Sprache: Deutsch
ISBN: 3884795236

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Versuch über Cioran

von Fernando Savater
Claus B Schmidt
(Übersetzer)

Taschenbuch: 176 Seiten
Verlag: Raben Vlg (1985)
Sprache: Deutsch
ISBN: 3922696457




VERSUCH ÜBER CIORAN führt in ein Denken ein, das Fluchtwege aufzeigt, Möglichkeitsräume und Denkweisen erweitert und gleichzeitig vor der allumfassenden Unreflektiertheit heutigen Handelns warnt. Savater stellt Cioran im philosophischen, politischen und literarischen Kontext vor und nimmt ihn im guten Sinn ernst: Er hebt Cioran weder auf ein Podest, noch streut er dessen Gedanken wahllos in die Menge. "Savater entspricht dem destruktiven Charakter Benjamins: er räumt auf, und was übrig bleibt, ist der aufklärende Blick auf das Tollhaus ... Schnell und brillant wie ein Feuerwerk."

Florian Rötzer, taz

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Skepsis, Mystik und Dualismus

Eine Einführung in das Werk E. M. Ciorans (Gebundene Ausgabe)
von Cornelius Hell

(= Studien zur französischen Philosophie des 20. Jahrhunderts, Band 11)

Gebundene Ausgabe
ISBN: 3416018141

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Ein Gespräch. Geführt von Gerd Bergfleth

Broschiert: 64 Seiten
Verlag: Konkursbuch Verlag (Juni 1996)

Sprache: Deutsch
ISBN-10: 3887693019
ISBN-13: 978-3887693015


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Suicide in French Thought from Montesquieu to Cioran

Suicide in French Thought from Montesquieu to Cioran (Studies in the Humanities: Literature-Politics-Society) (Hardcover)
by Zilla Gabrielle Cahn

Book Description
Suicide stems in large part from the human condition and, as such, is not a problem that can be solved. Former draconian and punitive laws against it have in the main been eliminated, but it remains a stigma and a heartache. In the twentieth century, suicide has become a problem for sociologists, psychiatrists, and social policymakers to "solve." In past centuries, however, suicide was a subject most fit for philosophers, theologians, writers, and, as the nineteenth century progressed, physicians. What establishes itself clearly throughout is that social attitudes and public policies toward suicide, as toward other important human issues, mirror the needs and peculiar circumstances of a culture. Yet sanctions against suicide, except in highly prescribed instances, transcend cultural specificity. To the question when, if ever, is suicide permissible, Western peoples and institutions, both secular and religious, reply, never. Duty to others, to God, to society, or to all of these, virtually always overrides personal desire or reasons to commit suicide.

Hardcover: 438 pages
Publisher: Peter Lang Publishing (January 1999)
Language: English
ISBN: 0820440035
Product Dimensions: 1.2 x 6.8 x 9.5 inches

Yasmine Reza over Cioran

Ook Yasmina Reza [had] ooit spijt, jaren geleden. Dolend door Parijs, zag ze in elkaar gedoken op een bank, een man. Haar pas vertragend liep ze langs. Toen weer terug. Het was Emil Cioran, Roemeens banneling, denker en dichter. Haar idool. "Ik wilde hem aanspreken, zeggen dat zijn gedachten over de wereld de mijne waren. Maar ik deed het niet. Het ontbrak me aan de juiste woorden. Vandaar L'homme du hasard, omdat ik gewild had dat het anders was gegaan."

DE MAN VAN HET TOEVAL
L'homme du hasard
van Yasmina Reza

Regie: Adrian Brine
Vertaling: Hugo Claus
Met: An Nelissen en Frank Aendenboom
Foto's copyright: Herman Selleslaghs

Speelperiode: 24 februari tot 1 april 2000

Klein Raamtheater - Antwerpen
(uit een interview met Yasmina Reza door Lies Schut, in De Telegraaf, 19.11.99)

Cioran trop optimiste

Denis Buican, ancien professeur de l’université de Bucarest et professeur à l’université de Paris-X, Nanterre, nous a fait parvenir sur Cioran le texte suivant.

Mon ancien compatriote des Carpates, mon trop rare compagnon de promenade de naguère dans le jardin du Luxembourg, le fameux anti-moraliste Cioran avait pu écrire, dans ses « Syllogismes de l’amertume » : « Si Noé avait eu le don de lire dans l’avenir, il n’est point douteux qu’il se fut sabordé. » Peut-être le subtil auteur du « Précis de décomposition » est, malgré tout et malgré lui, trop optimiste car il suppose, à cet ancêtre putatif, trop de sagesse lucide. D’habitude, Job - comme tout autre homme - préfère son fumier au néant. Pourquoi Noé aurait-il fait exception à cette règle commune ? De surcroît, Cioran, atteint d’une maladie irréversible qui lui obscurcissait le brillant esprit ténébreux, emmuré dans sa solitude des morts-vivants, n’a pu aucunement apprendre qu’il était l’un parmi les milliers d’autres - des suspects à perpétuité pour les oreilles - qui surveillent sans rien comprendre - de l’Etat policier coiffé par la cellule cancéreuse des écoutes de l’Elysée... « Le Mauvais Démiurge » pourrait prendre le titre de l’un des livres de Cioran, le traqué partout de Bucarest jusqu’à Paris.

Denis Buican
Huma
Article paru dans l'édition du 26 juin 1995.

Interviu cu Friedgard SCHULTE-THOMA

„...Emil Cioran a ratat sansa de a se sinucide la vreme...“


Interviu cu Friedgard SCHULTE-THOMA

Octavian BUDA si Valentin PROTOPOPESCU


La inceputul lunii mai a acestui an, cu prilejul celei de-a VIII-a editii a Colocviului International „Emil Cioran“ organizat la Sibiu, am avut sansa sa stam de vorba cu dna Friedgard Schulte-Thoma, ultima dintre iubitele filozofului. Aceasta, autoare, intre altele, si a unui roman epistolar dedicat lui Cioran, intitulat Pentru nimic in lume. O dragoste a lui Cioran (Weidle Verlag, Köln, 2001), si care, la vremea publicarii, a stirnit multa vilva in Germania, a avut amabilitatea sa raspunda intrebarilor (deloc comode) pe care i le-am adresat. Depasindu-si pudoarea, fireasca in asemenea imprejurari, de a dezvalui amanunte inedite despre viata intima a marelui moralist si despre relatia ei cu acesta, Friedgard Schulte-Thoma ni s-a adresat cu sinceritate, curaj si onestitate. Am descoperit astfel aspecte care arunca o alta lumina asupra unei parti secrete a biografiei cioraniene. L-am descoperit pe autorul Caderii in timp intr-o perspectiva omenesc-prea omeneasca...


In ce epoca a vietii dumneavoastra l-ati cunoscut pe Emil Cioran? Cum s-a produs intilnirea? Ati avut o speranta anume legata de un contact care promitea sa fie, cel putin la inceput, unul exclusiv cultural?

Intilnirea noastra s-a petrecut in 1981. A survenit in urma unei scrisori pe care i-am trimis-o la Paris si in care, pe linga admiratia pe care o nutream fata de opera lui, i-am marturisit speranta ca l-as putea cunoaste si in realitate. Din punct de vedere spiritual, nu exagerez daca spun ca eram aproape indragostita de un om care era capabil sa scrie aforisme atit de stralucite, aflate intr-o contradictie profunda cu morala societatii in care traiam. Cioran mi-a raspuns intr-o germana impecabila, invitindu-ma sa-l vizitez.

In acel moment, ce anume reprezenta Emil Cioran pentru dumneavoastra? Un mit, un ideal de scriitura, figura unui anumit gen de umanist sau intrezareati, in spatele tuturor acestor aspecte, o forma deosebita de umanitate, un om din carne si singe, dincolo de imaginea monstrului de subtilitate si nihilism?

Nu, nu pot sa afirm ca vedeam in el un umanist sau ca ma fascina exclusiv stilul. Initial, i-am citit cartile in traduceri germane destul de infidele si relative, prin urmare nu aveam acces la adevarata stralucire a stilului sau, asa cum se infatisa acesta in franceza, limba de origine. Ceea ce m-a atras in acea perioada la Cioran ca autor a fost un anumit sentiment al vietii (Lebensgefühl), genul de formula à rebours pe care o folosea, in care expresia functiona dupa logica lui „eu scriu dupa cum sint, ma scriu de fapt pe mine“, credinta ca lumea este rau intocmita si ca totul poate fi negat, certitudinea ca viata este un fenomen morbid etc. De fapt, il admiram pentru ca reusise sa exprime toate aceste lucruri intr-o forma extraordinar de spectaculoasa, cu mult mai impresionanta decit as fi reusit eu sau oricine altcineva.

Se poate spune, fara teama ca am rosti un neadevar, ca Emil Cioran s-a indragostit de dumneavoastra?

Cred ca se indragostise de mine. Da, cu siguranta ca asa a fost. Cit ma priveste, m-am indragostit la inceput de aforismele sale, de cartile pe care le scrisese. Erotismul meu, felul in care intelegeam eu iubirea, se deosebea fundamental de maniera in care Cioran concepea aceste lucruri – in sensul in care dragostea lui pentru mine era orientata, cel putin initial, intr-o directie exclusiv sexuala. Ca sa fiu sincera, nu ma inspira deloc gindul ca as putea face dragoste cu un barbat mult mai virstnic decit mine, care avea dublul anilor mei, adica 70. Am incercat deci sa-mi formulez pretextele refuzului astfel incit sa-l fac sa nu se simta jignit sau diminuat in virilitatea lui.

Ce fel de experienta a fost pentru dumneavoastra aceasta relatie stranie, paradoxala, complexa pe care ati avut-o cu Emil Cioran in conditiile in care diferenta de virsta era extrem de mare? Ce anume a precumpanit atunci, din unghiul dumneavoastra de vedere, care era acela al unei femei inca tinere, de 35 de ani? Fascinatia in fata intelectualului rafinat sau o anumita simpatie de ordin moral, nuantata pina la sentiment?

Pe vremea cind doar ii citeam volumele, fireste ca diferenta de virsta nu avea nici o importanta. Il citeam si-atit, era numai o prezenta abstracta, exclusiv auctoriala. Atractia pe care o simteam fata de Emil Cioran tinea de specia excitatiei pe care o resimti in fata excelentei exercitiului spiritual. In schimbul epistolar de dinaintea intilnirii noastre, el mi-a spus: „Va simt ca pe sora mea intru spirit (ma soeur spirituelle) si sint incredintat ca ne este comuna o dimensiune nocturna, adinc inradacinata in conceptul de melancolie“. In schimb, dupa ce ne-am vazut, am observat ca pe el l-a atras la mine mai curind trupescul, dimensiunea erotic-corporala. Evolutia relatiei noastre a indicat faptul ca Emil Cioran nazuia la un contact mult mai direct, dar acest lucru nu ne-a impiedicat totusi sa fim prieteni. Este vorba despre o prietenie extraordinar de frumoasa, care s-a intemeiat exact pe acea zona nocturna a firilor noastre de care pomenea Cioran.

Care era comportamentul lui Cioran pe vremea cind se indragostise cu adevarat de dumneavoastra? Va adresez aceasta intrebare deoarece era clar ca el traia o experienta cruciala, dovedindu-si siesi ca se mai poate aprinde amoros, ca inca mai poate iubi frenetic. Era oare speriat, era fericit, se simtea tulburat, nutrea sperante legate de aceasta dragoste, pentru el tirzie?

In ceea ce ma priveste, la primele noastre intilniri, eram extrem de timida. Cit il priveste pe Cioran, ceea ce va voi spune acum poate ca o sa li se para unora o grava indiscretie. Oricum, asa ceva nu am consemnat nici macar in cartea mea despre el, dar, pentru ca au trecut de-atunci, iata, mai bine de 20 de ani, cred ca, pina la urma, nu savirsesc nici o impietate. Asadar, este perfect adevarat ca relatia mea cu filozoful s-a consumat inclusiv in plan sexual. In ciuda premierei pe care o constituie aceasta marturisire pe care o fac acum, totusi, cine a citit cu atentie cartea mea despre Cioran a putut sa intrevada printre rinduri acest lucru.
Pe el l-a speriat faptul ca ii acceptasem oferta erotica din pura compasiune. Nu dorea sa-mi fie mila de el. Dar, in definitiv, Cioran si-a dorit imens aceasta iubire, iar relatia noastra nu putea sa existe decit daca participam deopotriva la ea, fiecare cu ceea ce era in masura sa-i daruiasca celuilalt. Recunosc ca ne simteam foarte tulburati deoarece contactul nostru includea atit trupescul, cit si spiritualul. Sincer, asemenea relatie nu a mers, cel putin din perspectiva mea...

Nu ati avut oarecum sentimentul unei relatii incestuoase, cu un fel de tata ideal, de ordin spiritual?

Iata o intrebare foarte interesanta. Spun asta pentru ca Emil Cioran a afirmat intr-o scrisoare pe care mi-o adresase, epistola reprodusa si in cartea mea despre el, ca „s...t daca ati fi fost fata mea, nu i-as fi permis nici unui barbat sa va curteze, iar daca ati fi fost sora mea, am fi intretinut categoric o relatie incestuoasa“.

Credeti ca Emil Cioran a intinerit in urma relatiei cu dumneavoastra sau ca macar s-a simtit mai tinar? Va intreb asta pentru ca in unele fotografii din romanul dumneavoastra epistolar Cioran este infatisat intr-o ipostaza foarte sportiva, foarte juvenila, aproape strengareasca…

Parerea mea este ca la o astfel de intrebare ar fi fost mai indreptatita sa va raspunda Simone Boué, caci ea l-a cunoscut pe Cioran mai adinc decit mine, traind impreuna cu el mai bine de patru decenii. Eu sint foarte subiectiva si nu pot sa spun ca am observat acest lucru deoarece moralistul s-a indragostit imediat de mine, iar acest fapt poate fi usor reconstituit dupa schimbul epistolar ce a urmat venirii mele la Paris, in 1981. Nu stiu, asadar, daca s-a simtit mai tinar, dar e sigur ca felul in care a decurs relatia noastra l-a intristat profund pentru ca a inteles ca ea, de fapt, este imposibila. Nu, nu cred ca a intinerit sau, daca s-a intimplat ceva de genul acesta, s-a intimplat doar la inceput, cind abia incepuse sa spere.

Este adevarat ca a plecat spontan la Köln ca sa va intilneasca si ca aceasta calatorie a insemnat pentru Cioran o adevarata „aventura in cosmos“, caci e cunoscuta imobilitatea lui pariziana din ultimul deceniu de viata?

Da, asa este, venirea lui la Köln a insemnat o adevarata „iesire in cosmos“. Faptul reiese clar din scrisorile pe care mi le-a adresat ulterior. Tocmai de aceea m-am simtit ca o regina incoronata: efortul sau a fost comparabil cu ceremonia unei ungeri regale. Si, din aceasta pricina, am incercat ca sosirea lui sa coincida cu o perioada de gratie, scurta, ce-i drept, caci nu a ramas la Köln decit trei zile...

Ati trait cumva sentimentul ca l-ati „infiat“?

Dificil de spus... Vedeti, eu aveam deja un copil, nu-mi mai trebuia inca unul, chiar si in ordine simbolica! Cine stie, poate... Nu, de fapt, daca e sa ma gindesc bine, pentru mine Cioran nu a fost un copil de infiat. Asteptam sa se infatiseze in aceasta relatie ca un adult adevarat, iar el a intuit acest lucru. Simone a insemnat pentru el un autentic profil matern. Ea l-a hranit realmente. Accept ca, poate, la inceput, am avut unele porniri materne, dar apoi nu m-am purtat deloc ca o mama, cu atit mai mult cu cit eram si mult mai tinara.

In economia acestei relatii atit de speciale, Cioran era gelos, traia accese de invidie fata de ceilalti barbati care va inconjurau, se simtea periclitat in iubirea lui de ceilalti „masculi“ mai tineri?

Sigur ca da, inca foarte mult! Era gelos pe Henri Michaux, era ingrozitor de gelos, iar el numea acest simtamint o gelozie balcanica, o pornire extrem de originara, izvorita din radacinile fiintei lui...

Cunoscindu-l pe Cioran, devenind intima cu el, ati intilnit cu acel prilej si alte personalitati culturale, apropiati de-ai sai?

Din cauza acestei gelozii teribile, aproape ca nu am avut prilejul sa cunosc pe nimeni din preajma filozofului. I-am intilnit pe Simone Boué, pe Henri Michaux, pe pictorul Matta. Cioran o eclipsa intotdeauna pe Simone, dorind sa apara drept un mare solitar, care facea totul de unul singur. Daca ascultai ceea ce spunea in public, mai ales in interviuri, te intrebai unde anume o ascunde pe Simone. L-am criticat pentru aceasta flagranta nerecunostinta. Pe mine nu a vrut sa ma prezinte apropiatilor sai. A gresit o singura data, facindu-mi cunostinta cu Michaux, pe care a devenit iute gelos. Daca ar fi fost dupa el, ar fi trebuit sa-l astept intr-o camera de sub cerul Parisului...

...Eventual singura, pe o insula pustie, unde numai el sa aiba acces...

Visa sa stam impreuna pina si in sicriu, deoarece astfel ar fi putut sa-mi vorbeasca la nesfirsit, sa ma farmece cu discursul lui de o subtilitate ingrozitoare. I-am raspuns ca as prefera ca tovarasia din sicriu sa o impartasim in aceasta viata si inca destul de repede. De fapt, nici nu vad de ce am fi avut nevoie de un sicriu ca sa putem comunica! Daca ar fi sa aleg un sicriu pe care sa-l impart cu cineva, atunci aceea ar fi cripta imperiala din Bamberg!

Credeti ca, iubindu-va, Emil Cioran traia sentimentul ca fura ceva de la viata, ca traieste clandestin ceva ce este prohibit, care ar putea trezi revolta unor persoane morale?

Nu, nu, in nici un caz. Dimpotriva, el mi-a reprosat mie in permanenta acest lucru si a incercat sa-mi induca sentimentul de vinovatie. Oricum, tin sa va spun ca i-am subliniat faptul ca are o partenera de viata extraordinara si ca eu nu pot suporta o viata rupta in doua, o dihotomie ce mi se parea nedreapta. Cioran insa a persistat sa-mi impuna simtamintul de culpabilitate, ceea ce reiese clar din corespondenta noastra, ca si din roman.

L-ati intovarasit timp de mai multi ani... Care este ultima impresie pe care v-a lasat-o? Poate ca a existat o atitudine cu care nu ati fost de acord, macar din perspectiva faptului ca Emil Cioran a fost un propovaduitor al fascinatiei in fata suicidului...

Cred ca aveti dreptate. Asa este. Dupa o viata intreaga in care a predicat ca sinuciderea reprezinta cel mai dezirabil sfirsit al omului, surprinde felul cum a disparut dintre noi. A ratat pur si simplu sansa de a se sinucide la vreme. Cine stie, poate ca a asteptat prea mult... Cartea mea se sfirseste cu aceasta interogatie: „Cit de indepartata e clipa in care sinuciderea mai este inca posibila?“. Eu am sustinut ca Emil Cioran a depasit acel moment precis si ca nu a mai putut sa-si ia viata... Practic, nu a stiut cind s-o faca sau a aminat prea mult, astfel incit a trecut pe linga clipa prielnica. Ii adresez oare un repros? Cine stie, poate ca e vorba de o asteptare eterna, de o atitudine izvorita dintr-o acuta melancolie, din pricina careia acea clipa privilegiata nici nu avea cum sa fie atinsa vreodata...

Simpozion Emil Cioran. Cu Cioran la Rasinari

Simpozion Emil Cioran. Cu Cioran la Rasinari

Valentin PROTOPOPESCU
In prima zi a colocviului, „ostilitatile“ s-au desfasurat la Sibiu, in Aula „Avram Iancu“ a Universitatii „Lucian Blaga“. Dupa cuvintele de deschidere rostite de rectorul institutiei sibiene, Dumitru Ciocoi-Pop, si de secretarul stiintific al Facultatii de Litere, Istorie si Jurnalistica, Ilie Gutan, s-au „produs“, in ordine, Friedgard Schulte-Thoma, Rodica Binder, Nicolae Cretu, Eugene Van Itterbeek si subsemnatul, moderatori fiind Irina Mavrodin si filozoful Ion Dur. Daca Rodica Binder a vorbit despre portretul pe care i-l creioneaza lui Cioran germanul Nikolaus Sombart in jurnalul sau parizian, portret plin de savoare si de spectaculoase picanterii si anecdote, Friedgard Schulte-Thoma a citit un text in care evoca relatia sa amoroasa cu marele scriitor. Fara a exagera, trebuie spus ca prezenta la Sibiu a acestei nemtoaice de la Köln, fosta universitara de formatie filozofica, a constituit clou-ul intregii reuniuni. Spun asta pentru ca Friedgard Schulte-Thoma a publicat la Editura Weidle un roman epistolar intitulat Um nichts in der Welt. Eine Liebe von Cioran, carte fascinanta tocmai pentru ca dezvaluie povestea unui amor tirziu al moralistului: femeie de treizeci de ani, maritata, Friedgard, excedata de admiratia fata de stilul ginditorului, purcede la a-i scrie acestuia; cei doi programeaza o intilnire, iar rezultatul este ca Emil Cioran, de-acum septuagenar, sucomba in cel de pe urma coup de foudre al vietii sale; urmeaza o teribila saga de iubire, in care accentele intelectuale predomina de partea tinerei germane, in vreme ce la Cioran aspectele erotice nu sint deloc de neglijat. Scrisorile cioraniene catre Friedgard, concepute intr-o extraordinara limba germana si absolut inedite, sint completate de consideratiile autoarei, fina observatoare a ascunzisurilor unei personalitati altfel extrem de discrete. Fotografiile ce acompaniaza volumul sint si ele elocvente pentru dimensiunea amocului amoros ce-l cuprinsese pe Cioran: scriitorul este surprins in ipostaze in care pare intinerit de-a dreptul, semn ca dragostea poate face minuni, indiferent de virsta. Din pacate pentru cititorul roman, exista numeroase obstacole in calea traducerii fascinantului roman epistolar, editorul Gallimard blocind practic orice negociere privind copy right-ul.

Interviu în exclusivitate cu Friedgard Thoma despre Emil Cioran

Interviu în exclusivitate cu Friedgard Thoma despre Emil Cioran:
Iubire si scrisori

Prezentând în nr. 47 al Românie literare romanul epistolar Emil Cioran - Friedgard Thoma, apãrut recent în Germania, promiteam un interviu cu Friedgard Thoma. Mã tin acum de cuvânt.
Apropierea de autoarea acestui inedit roman epistolar s-a fãcut, empatic, firesc, într-o searã de sfîrsit de noiembrie cînd printr-o convorbire telefonicã prealabilã, am stabilit sã ne întîlnim în locuinta ei situatã într-o zonã rezidentialã din Köln. Drumul nu a fost lipsit de peripetii. Desi am fost prevenitã asupra unor trucuri de care trebuia sã uzez pentru a nu ajunge printr-o scurtã si gresitã cotiturã a masinii, direct pe podul care ne purta pe celãlalt mal al Rinului, în loc sã ne înscrie pe traseul care ne-ar fi dus nu fãrã serpuiri, la adresa cuvenitã, eroarea aproape inevitabilã s-a produs. Si odatã cu ea, întîrzierea cu vreo 20 de minute fatã de ora stabilitã. Gratie telefonului mobil, am putut comunica aceastã cu totul nedoritã " abatere " de la traseu si de la program. Vocea puternicã si modulatã, caldã a celei care îl încîntase si pe Cioran, fãcîndu-l sã se bucure de binefacerile telefonului (pe care altminteri îl detesta) m-a linistit. Cînd am ajuns, eram deja asteptatã "la fereastra" deschisã, desi seara era rece si ploioasã. O siluetã delicatã, ochi vii, de culoarea chihlimbarului, o privire jucãusã, directã, dar totusi iscoditoare, un rîs generos - într-un cuvînt o femeie frumoasã, fermecãtoare m-a întîmpinat. Fiind împreunã cu sotul care m-a condus la aproape "inaccesibila adresã", am fost imediat poftiti în casã, invitati la un ceai. O usoarã undã de emotie plutea în aer, de ambele pãrti. S-a spulberat însã deîndatã ce Emil Cioran a fost adus în discutie. Am putut vedea manuscrisele scrisorilor: rãsfoindu-le cu delicatete autoarea mi-a spus "uitati viu, parcã ieri le-am primit. Cînd le recitesc, el este ca si viu". Un concert de pian asupra cãruia nu m-am concentrat deloc, se auzea discret dintr-o altã încãpere, readucînd-mi în memorie faptul cã si scrisorile poartã din cînd în cînd amprenta pasiunii muzicale a celor doi protagonisti ai romanului. Ne-am asezat apoi la o mare masã rotundã, în dreptul unei ferestre, într-o vastã camerã ai cãrei pereti erau acoperiti de rafturi pline cu cãrti si de tablouri (fostul sot al autoarei, este pictor si profesor universitar de filozofie). Am deschis microfonul si am început dialogul pe marginea unei corespondente - a cãrei traducere în limba românã este pe cît de urgentã pe atît de iminentã. Din cîte am aflat, douã edituri din România si-au manifestat deja interesul fatã de aceastã pe cît de neasteptatã pe atît de emotionantã carte.
Rodica Binder: Corespondenta pe care timp de cîtiva ani ati întretinut-o cu Emil Cioran a fost publicatã si ea este însotitã de comentarii, precizãri si descrieri ale împrejurãrilor în care au fost redactate, expediate si primite scrisorile. Doamnã Friedgard Thoma, ce v-a determinat sã publicati aceastã corespondentã, cu un marcat caracter intim si ideatic, în acelasi timp?
Friedgard Thoma: Existã mai multe motive. La început, un prieten - profesorul Ulrich Horstmann*, autorul cãrtii "Untier" mi-a spus: " Tu trebuie într-o bunã zi sã scrii aceastã istorie". Am ezitat fiindcã mi-am spus cã nu-mi este îngãduit sub nici motiv sã fac asa ceva cît timp partenera de viatã a lui Emil Cioran, Simone Boué, trãieste încã si cum speram cã va mai trãi încã multã vreme nu am crezut cã aceastã carte va mai putea fi publicatã vreodatã. Dar, atunci cînd moartea ei a survenit subit, mi-a venit totusi ideea de a edita acest schimb de scrisori împreunã cu istoria relatiei noastre fiindcã eu cred cã în aceastã relatie existã ceva paradigmatic. As putea spune cã aceastã iubire, care a fost imposibilã de fapt, amintea de acele întîmplãri omenesti care par a avea un caracter mitic. Un bãrbat în vîrstã si o femeie tînãrã, plinã de asteptãri - iatã o combinatie demnã de o "naratiune" pe care am realizat-o legînd scrisorile de povestea întîlnirilor noastre.
Scrisorile contin ele însele, adesea în cuprinsul lor, povestea unor întîmplãri pe care le completati apoi prin descrieri, prin comentarii "la obiect" prin unele precizãri. în scrisorile sale, Cioran este apoape acelasi pe care-l cunoastem din aforismele sale, desigur cu unele exceptii. Fiind profesoarã de filozofie, v-ati putut imediat da seama de acele pasaje care nu fac parte din ceea ce s-ar putea numi "gîndurile cioraniene"...
Mã mirã putin faptul cã întrevedeti în aceste scrisori o asemãnare cu aforismele. Eu nu le-am receptat ca atare. Ce-i drept, se întîmplã însã, din cînd în cînd, ca Cioran - neputîndu-si realiza idealul unei relatii amoroase intensive - sã recadã în melancolie si tristete... Dar, la începutul relatiei noastre, el rãmîne cantonat în cotidian si nu-si exprimã chiar foarte poetic, idealul sãu de iubire. Cred asadar cã Cioran se prezintã în corespondenta noastrã altfel decît îl cunoastem din lectura aforismelor sale...

Insist totusi pentru cã mi se pare cã scrisorile contin o multime de enunturi apodictice, de asertiuni specific cioraniene, care se întipãresc în memoria cititorului acestui inedit volum.In acest sens am si avansat ideea unei asemãnãri, desigur partiale, a unor fragmente din scrisori, cu celebrele aforisme. Si vedeti, astfel am ajuns si la situatia oarecum paradoxalã a relatiei dumneavoastrã cu Cioran pe care l-ati cunoscut ca om, în ipostaza sa "particularã, privatã" adresîndu-i-vã însã, deja în prima scrisoare, de pe pozitiile filozofiei. A existat un contrast puternic între fata umanã si cea "auctorialã" a lui Emil Cioran?
Da, si încerc chiar la începutul cãrtii mele sã descriu acest contrast. Cioran evolua mult prea vãdit în registrul anecdotic al conversatiei noastre, vorbindu-mi de pretul chiriei,de salariile profesorilor si nu pãrea prea interesat sã mi se adreseze în termenii în care eu îl cunosteam, din lectura aforismelor si în care doream sã-l aud! Trebuia mereu sã-l readuc la acel nivel... L-am întrebat de pildã care este conceptul sãu despre divinitate si el mi-a dat un rãspuns minunat (nu stiu dacã era într-adevãr un aforism): "Dumnezeu este o entitate nominabilã doar în monologul celui însingurat". Erau sintagme miraculoase, era ceea ce asteptam, dar ele erau rare si sunt tentatã sã spun cã trebuia (rîde) sã dau o mînã de ajutor pentru a le putea auzi. Fiindcã altminteri îmi vorbea de grijile zilnice.

Nu credeti cumva cã atunci cînd cunoastem un autor doar din cãrtile sale înclinãm, cînd avem sansa de a-l întîlni în carne si oase, sã proiectãm asupra imaginii sale reale, impresiile pe care ni le-a lãsat lectura operei? Si în aceastã ordine de idei as vrea sã stiu dacã pentru dumneavoastrã faptul de
a-l fi cunoscut personal si intim pe Emil Cioran, a însemnat o deceptie, o binefacere sau a fost doar o relatie melancolicã, lipsitã de viitor?
Grozav! Aveti dreptate în fiecare din cele trei supozitii!Fiecare din aceste trei aspecte sunt adecvate la real... La început a fost o anumitã dezamãgire, dar dupã aceea o mare sansã si privitã în ansamblu, relatia noastrã a fost o experientã plinã de melancolie.

Relatia pe care ati avut-o cu Cioran pare a avea ceva romanesc în ea. La începutul discutiei noastre ati enuntat caracterul ei paradigmatic pe care l-as preciza si în termenii urmãtori: spiritul care se îndrãgosteste de frumusetea trecãtoare a lumii, cel dintîi termen fiind întrupat de bãtrînul filozof, cãrturar, savant, erudit, cel de-al doilea, cel mai adesea, de o frumoasã si tînãrã femeie. în ceea ce vã priveste ati fost interesatã în stabilirea unui contact pur intelectual cu Cioran.în realitate el nu pare a fi corespuns întru totul asteptãrilor dumneavoastrã.
Da, asa este. Cu certitudine. Revenind acum la cel de-al doilea aspect, cel al asteptãrilor mele intelectuale, situatia devine mai complicatã. În scrisoarea pe care în carte am numit-o "Scrisoarea de Pasti" Ciroan afirmã cã în principiu nu întretine cu femeile intelectuale relatii erotice dar cã în cazul meu, ar prefera sã discute despre Lenz (...) în pat! Desigur cã aceastã afirmatie m-a flatat, în cele din urmã s-a întîmplat cã nu a mai dorit sã vorbeascã despre Lenz în pat (rîde). în fond, în relatia pe care a avut-o cu mine, a vrut sã fie franc si lipsit de pretentii. Eu însã nu am putut sã suport asa ceva, nu eram obisnuitã cu astfel de situatii si doream ca el sã fie foarte exigent, a trebuit chiar sã-l constrîng si nu stiu dacã acest lucru i-a fãcut plãcere.

"Constrîngerea" la care l-ati supus este si ea expresia asteptãrilor dumneavoastrã fatã de contactul personal cu Emil Cioran, în urma lecturii scrierilor sale. Dar care a fost originea fortei de atractie pe care el a exercitat-o asupra spiritului unei foarte tinere femei? Prin ce au actionat textele lui asupra dumneavoastrã încît sã vã determine sã-i adresati o scrisoare, sã vã întîlniti apoi, sã întretineti si o relatie epistolarã de-a lungul mai multor ani, cu Cioran ?
Da, numai cã pe-atunci nu mai eram nici eu chiar foarte tînãrã, aveam vreo 35 de ani si un bãiat de zece ani - iatã un lucru care trebuie amintit fiindcã nu m-am comportat aidoma unei fete foarte tinere. Aveam o oarecare experientã de viatã ...

...desigur, dar în comparatie cu bãtrînul filozof ...
Da, (rîde) ... Sã revin însã la întrebarea pe care mi-ati pus-o. Ceea ce m-a fascinat de la început a fost felul sãu de a încãlca toate tabuurile în aforismele sale printr-un demers pe care francezii îl numesc atît de frumos "a rebours". Scria de pildã cã o culturã care începe odatã cu construirea de catedrale este condamnatã sã sfîrseascã în hermetismul schizofreniei: un enunt care era provocator, era agresiv, era strãlucit formulat; sau altul: scepticismul nu ar fi decît eleganta spaimei... Cine altcineva decît el putea afla astfel de formulãri miraculoase. în cele din urmã este indiferent dacã aforismele lui erau sau nu adevãrate. Nici nu are rost sã ne punem aceastã problemã.Ele existã, ele sunt ceea ce sunt si ele sunt, pe deasupra, strãlucite. Totusi el a scris si unele aforisme dotate cu o mare fortã poeticã, cum este de pildã aforismul castanei: noaptea, el se plimbã prin Luxembourg ; la picioare îi cade o castanã care se pocneste si ecoul stîrnit în spirit de zgomotul desprinderii, iesirii fructului din coajã, aceastã întîmplare cu totul minorã care nu avea legãturã cu nimic, îl cufundã într-o stare de miracol, în betia faptului împlinit ca si cînd nu ar mai exista întrebãri ci doar rãspunsuri - dupã care, pragamtic, ironic aproape, conchide cã astfel s-a decis sã-si continue plimbarea. Ei bine, am fost pur si simplu încîntatã.

în paginile cãrtii dumneavoastrã se poate citi cã "erati femeia care ar fi trebuit sã scrie o carte despre Cioran" - o formulã de prezentare si identificare. Ati scris desigur o carte - tîrzie, integrînd corespondenta pe care ati întretinut-o cu filozoful, într-o povestire. Dar în afarã de aceastã carte, ati mai redactat vreun studiu filozofic despre Cioran, un volum?
Nu, am avut dintotdeauna intentia de a mã plasa preponderent în domeniul beletristicii.Doream sã fac fatã si unei anumite exigente estetice prin aceastã carte si sper cã am reusit, spre sfîrsitul volumului, în episodul plimbãrii noastre prin cimitirul Montparnasse unde Cioran se aflase în cãutarea propriului sãu loc al odihnei de veci, pregãtit din timp de Simone.

Cartea, asa cum se prezintã ea cititorului, se situeazã la jumãtate de drum între beletristicã si documentaristicã (dacã sub acest concept putem plasa si corespondenta, ca tip de comunicare paraliterarã foarte apreciat azi si din motive voyeuriste, prin atractia pe care o exercitã viata intimã a marilor personalitãti asupra publicului larg). în mãsura în care aceste personalitãti sunt masculine, femeile care posedã scrisorile, mãrturiile unei legãturi amoroase, deschid portite spre zonele mai putin accesibile ale existentei "monstrilor sacri". Credeti cã publicarea corespondentei Dumneavoastrã cu Emil Cioran poate zgîria suprafata netedã a mitului sãu, cã existã voci care se opun dezvãluirilor continute în scrisori?
Da, existã voci ale unor persoane care în mãsura în care se cred pãstrãtorii "Sfîntului Graal", tind sã-l trateze pe Cioran ca si cum el ar fi un Buda a cãrui operã nu poate fi decît slujitã, adulatã. Eu sunt de cu totul altã pãrere. Eu cred cã tocmai contururile contradictorii ale personalitãtii sale - de altfel termenul de contur contradictoriu existã în chiar unul din aforismele sale - nu au nimic de-a face cu vreo zgîrieturã ci dimpotrivã, ne fac sã-l îndrãgim pe Cioran. Sper cã am reusit sã relev în cartea mea cã tocmai acele trãsãturi ale firii sau comportamentului sãu, care-mi pricinuiau uneori mici supãrãri, fãceau parte din persoana lui, din felul lui de a se face iubit.

La sfîrsitul volumului îi faceti lui Cioran un repros foarte fin desi poate neintentionat: acela de a nu fi putut în cele din urmã sã-si aplice propria teorie a sinuciderii exact cînd decrepitudinea si dependenta de ceilalti, pe care le detesta atît - începuserã sã se manifeste. Pe parcursul cãrtii ati fost de altfel destul de severã cu Cioran. Ati afirmat cã ati dorit sã-l fortati în relatia pe care ati avut-o, sã rãmînã la nivelul filozofic si ideatic al conversatiei. Considerati asadar acum cã acest final al cãrtii ar putea fi într-adevãr un repros?
Da, dacã privim lucrurile de foarte departe, da. Aceastã frazã finalã - în care afirm cã este foarte posibil ca viata sã nu fie usoarã dar cã moartea ar fi putut fi, dacã decizia sinuciderii ar fi fost luatã - este un enunt disperat. Fiindcã în ceasul cel de pe urmã suntem totusi incapabili sã facem ceea ce am propovãduit o viatã întreagã. Si totusi partea finalã a cãrtii contine si un repros adresat tuturor acelor scriitori si filozofi care în viatã nu se conformeazã cîtusi de putin crezurilor proclamate în operã. În acest caz Heidegger este la fel de vizat ca Cioran... Dar cred cã este mai bine sã-i lãsãm sfîrsitului cãrtii un anumit grad de imponderabilitate, de poeticitate si melancolie. Asadar nu este vorba de un repros dar cine doreste sã vadã lucrurile altfel, este liber sã o facã.

În ceea ce-l priveste pe Cioran el a avut un comportament care a contravenit propriilor sale precepte. Apologetul singurãtãtii, al melancoliei si disperãrii a fost în viata de zi cu zi, un om monden. Cum ati perceput dumneavoastrã acest contrast?
Nu stiu exact ce acceptiune acordati termenului de monden. Pot sã vã spun însã cã îsi cumpãra hainele din prãvãliile de "second hand". Nu era un monden în sensul deplin al termenului, era însã foarte iubitor de viatã. De altfel nici nu a trãit singur: a avut o minunatã partenerã de viatã, o femeie foarte frumoasã care în baza titlului ei stiintific de "agregèe" beneficia si de un salariu foarte bun, putîndu-l astfel întretine si pe Cioran. Numai cã, ori de cîte ori se anunta un interviu, trebuia creatã impresia cã el trãieste "singur" si acest neadevãr i l-am reprosat mereu desi Simone spunea cã de fapt totul este în ordine. Eu însã nu mi-am putut da seama pe deplin dacã ea era convinsã cã "totul era în ordine"... Oricum, Cioran a fost un bãrbat cãruia i-a plãcut mult sã rîdã, care a tinut la viatã, care a iubit femeile si care a avut parte de femei frumoase (rîde).

Da, scrisorile pe care vi le-a adresat atestã spusele dumneavoastrã. Existã în unele dintre scrisori pasaje de mare intensitate eroticã. Dar sã ne oprim deocamdatã la relatia contradictorie pe care o avea cu România: o relatie de urã si iubire în acelasi timp continutã în fragmentele unor scrisori - de pildã în cea despre sosirea fratelui sãu din tarã, la Paris, sau despre limba maternã pe care nu avea plãcerea sã o vorbeascã. în ce proportii v-a fost accesibilã imaginea pe care Cioran o avea despre tara sa?
Mi-am putut da seama cã a avut o copilãrie foarte fericitã si pornind de la acest simplu fapt sunt convinsã cã în sufletul sãu tinea foarte mult la patria lui. Dar asa cum se întîmplã adesea în viatã, o mare iubire, odatã stinsã, devine obiectul unor dezavuãri. Am avut senzatia cã nu si-a luat în serios refuzul de a mai vorbi româneste. Cînd fratele sãu a sosit la Paris si a putut vorbi cu el din nou româneste, au revenit deodatã la suprafatã toate acele sentimente si amintiri care fuseserã refulate: amintiri din copilãrie dar si cele legate de rãtãcirile lui politice din tinerete. Cine stie ce rol au detinut toate acestea în memoria sa pentru a-l face sã exclame din cînd în cînd "Uf, acum nu mai vreau sã vorbesc româneste!". Cred cã si-a iubit tara, cã a refulat totusi o serie de amintiri legate de ea cu care ulterior, nu a mai dorit sã fie confruntat.
Ati afirmat în cartea dumneavoastrã cã nu ati primit din partea lui Cioran nici un fel de detalii, de informatii despre rãtãcirile politice ale tineretii sale în România, despre relatiile cu Garda de Fier. El nu v-a vorbit despre toate acestea dar în mai multe interviuri acordate presei franceze republicate în volumul bilingv "Mon Pays", apãrut în 1996 la editurile Gallimard/Humanitas, el a fãcut mãrturisiri despre acea perioadã.
Da, dar odatã cînd i-am adresat din nou o întrebare despre Garda de Fier a fost enigmatic si nu mi-a povestit nimic nici despre Berlin unde s-a aflat ca bursier al Universitãtii Humboldt si unde, pe Fasanenstrasse, la "Literaturhaus" a fost gãsit permisul lui de student. La fel de putin mi-a povestit si despre o altã cãlãtorie a lui, în 1940, în România. Aflu despre ea abia acum din lectura unor reviste germane de specialitate...

Sã revenim acum la romanul dumneavoastrã epistolar - fiindcã totusi, cartea este si romanul unei relatii, existã în paginile ei un "crescendo" al intensitãtii amoroase care apoi, încet încet, se stinge, cu aceeasi tristete si melancolie pe care o au zilele toamnei în care ne aflãm acum... înainte însã ca scrisorile sã se rãreascã a survenit o cotiturã în relatia dumneavoastrã - mai ales în cursul si în urma vacantei petrecutã la Soglio. Cum percepeti acum acea rupturã, sensibilitatea de care Cioran a dat dovadã?
Ruptura a survenit cînd am fãcut cunostintã cu Simone Boué, partenera sa de viatã. Ne-am simpatizat din prima clipã si deodatã era clar cã nu voi mai putea scrie epistole confidentiale si secrete, cã episodul prim al relatiei mele cu Cioran apartinea deja trecutului. Nu am dorit de altfel sã ridic la un nivel sexual relatia noastrã dar dacã totusi, aceasta s-a întîmplat, a fost si fiindcã Cioran cãzuse de la început pradã unei asemenea obsesii încît eu am crezut cã trebuie sã-i vin în întîmpinare. Dar în scrisorile mele l-am lãsat sã înteleagã fãrã echivoc cã nu-l mai pretuiam din aceastã pricinã; dimpotrivã eram chiar furioasã cã m-a pus în situatia de a converti erotismul în sexualitate, ceea ce nu dorisem sã se întîmple... Asa încît a fost minunat cã am putut-o cunoaste pe Simone si cã fãrã a-l jigni pe Cioran, puteam avea si un motiv de a nu mai continua nici într-un caz sã actionez în spatele ei.
Pe plicul portocaliu al unei scrisori datate 27.10.1992, scrisã de Simone, Cioran adaugã sub numele expeditoarei urmãtoarea propozitie "Existati în inima mea" ...
Da, continui sã exist, sã fiu prezentã în inima lui si aceasta mi se pare cu atît mai frumos cu cît, de fapt, între mine si Cioran atunci nu mai exista de fapt decît o prietenie...

La capãtul acestui episod din carte, precizati cã acele cuvinte scrise de Cioran pe plicul portocaliu sunt astãzi aproape sterse de anii care au trecut, dar numai aproape si nu complet. Cartea pe care ati scris-o despre aceastã iubire si prietenie este gata, se aflã în librãrii si îsi urmeazã propriul ei destin care continuã sã vã implice..Ati primit deja scrisori din partea cititorilor... Credeti cã o astfel de carte poate deschide cititorilor apetitul, le poate alimenta dorinta de a cunoaste opera lui Emil Cioran accesibilã doar unui cerc mai restrîns de interesati si initiati aici în Germania?
Fireste! Am prieteni despre care as putea spune cã nu sunt deloc intelectuali în sensul adevãrat al cuvîntului - cãrora cartea le-a plãcut foarte mult si le-a trezit interesul fatã de Cioran. Datoritã acestui interes resimtit si de cei mai putin înclinati spre filozofie cartea a ajuns la editura Weidle, desi manuscrisul interesase si unele edituri mari. Dar din pricina unor temeri ca si a unor amenintãri pornite de la Paris, din cercurile acelor adulatori ai "mitului Cioran", marile edituri s-au retras .

Cartea îsi va continua însã drumul prin traducerea ei în România. Ea este mãrturia ultimei mari iubiri a lui Cioran, cîtã vreme nu vor apãrea si alte scrisori, din partea unor alte admiratoare ale operei lui
Nu, nu este cazul (rîde).

Ce alte planuri literare aveti legate de Emil Cioran ?
Mai întîi trebuie sã avem grijã ca sã nu survinã neplãceri de la Paris. Scriu un roman în a cãrui a treia parte voi integra adevãrata poveste pe care aici în volumul de corespondentã, nu am evocat-o, fiindcã întîmplãrile s-au petrecut dincolo de scrisori.

Nu putem fi decît foarte curiosi.

Interviu de
Rodica Binder


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* Ulrich Horstmann, cel care a îndemnat-o pe Friedgard Thoma sã scrie acest roman epistolar, este autorul mai multor eseuri, cãrti de filozofie, culegeri de aforisme, romane, piese de teatru. Laureat al pemiului literar Kleist, Ulrich Horstmann, literat si filolog, este profesor la Institutul de anglisticã si americanisticã al Universitãtii din Giessen. El a fost în repetate rînduri invitatul unor emisiuni la radio si televiziunea germanã. El este între altele autorul renumitului eseu "Das Untier. Konturen einer Philosophie der Menschenflucht" (termenul de "Untier" fiind aproape intraductibil, mã rezum sã precizez cã suntem confruntati cu o metaforã a dezumanizãrii - asa cum partea a doua a titlului eseului indicã de altfel în termeni aproape explicativi: "Contururile unei filozofii a dezumanizãrii.) Horstmann se autodefineste ca un adversar rationalist al unei perspective optimiste asupra lumii.
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N.B. Interviurile seamãnã cu acele fotografii instantanee dar unice pe care ti-este îngãduit sã le faci. La developare îti dai seama cã poate unghiul, lumina, depãrtarea sau apropierea de model, ar fi putut fi altele. Mai bune, mai putin bune? Se întîmplã ca dupã ce am închis microfonul, interlocutorul sã fie dintr-o datã dispus sã facã si mãrturisiri nesperate. Friedgard Thoma a revenit însã si dupã ce practic interviul fusese încheiat, asupra unor teme si idei ale cãrtii, ale amintirilor pe care i le-a lãsat relatia avutã cu Emil Cioran. Am rãsfoit împreunã paginile romanului, am comentat unele pasaje, am discutat desprea aventura editorialã a acestei cãrti, programatã sã aparã la o mare editurã germanã care s-a retras însã dintr-un contract deja onorat, de teama reactiilor casei Gallimard, care posedã drepturile de proprietate asupra scrierilor lui Emil Cioran. Mica editurã Weidle, asumîndu-si riscul publicãrii acestei corespondente, redactatã în original, în germanã, de Emil Cioran si Friedgard Thoma, nu avea cum sã fie scutitã de avertismentele care s-au fãcut imediat auzite de la Paris, dar care au rãmas pînã acum, din fericire, lipsite de consecinte juridice. Destinul acestui roman senzational, nesperat, nu este asadar lipsit de o trenã de peripetii care ne trimit cu gîndul la grijile mãrunte ce-l mãcinau pe Emil Cioran la începutul relatiei sale cu Friedgard Thoma, tînãra profesoarã sositã de la Köln la Paris sã discute de fapt, despre aforisme si filozofie, cu autorul silogismelor amãrãciunii, al tratatului de descompunere...scrieri care în mod paradoxal i-au inspirat admiratoarei, si nu numai ei optimism si încredere.