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Soyons fous, buvons du café!




C'est à coup d'excitants (café, tabac) que j'ai écrit tous mes livres. Depuis qu'il m'est impossible d'en prendre, ma «production» est tombée à zéro. A quoi tient l'activité de l'esprit!
Cioran
Cahiers 1957-1972




Le comptoir d'un café est le parlement du peuple.
Honoré de Balzac

Le café est un breuvage qui fait dormir quand on n'en prend pas.
Alphonse Allais

La café sans caféine, ça réveille pas, mais ça empêche pas de dormir!
Maïtena
Extrait de Les déjantées

On change plus facilement de religion que de café.
Georges Courteline
Extrait de La Philosophie de Georges Courteline

Tous les matins, j'apporte à ma femme le café au lit... Elle n'a plus qu'à le moudre!
Pierre Doris

Si l'on vous sert une tasse de café, ne vous efforcez pas d'y trouver de la bière.
Anton Tchekhov
Extrait de Correspondance

Je sais maintenant pourquoi les Anglais préfèrent le thé : je viens de goûter leur café.
Pierre-Jean Vaillard

Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après.
Anne Morrow Lindbergh

Tout passe en ce monde, sauf le café dans les mauvais filtres.
Alphonse Allais
Extrait du journal Le Chat noir - 4 Février 1882

Quand on a oublié d'acheter du sucre, on peut parfaitement sucrer son café avec une betterave, mais c'est plus long.
François Cavanna
Extrait de Le saviez-vous?

L'autre jour, au café, je commande un demi. J'en bois la moitié. Il ne m'en restait plus.
Raymond Devos
Extrait du sketch Il y a des choses bizarres

Il y a des jours où le bonheur minuscule du café du matin ne vient pas à bout des nouvelles du jour.
Sylviane Agacinski
Extrait du journal Libération - 9 Mars 2002

Thé et café donnent de l'esprit à ceux qui en ont et des insomnies à ceux qui n'en ont pas.
Verlet

Le bonheur, ça consiste à vivre penché au-dessus de deux bols à café, sur l'un on a écrit "toi", sur l'autre "moi" - et le monde peut crever la gueule ouverte.
Jacques Languirand
Extrait de Tout compte fait

Il y a quelque chose de commun entre la chaleur humaine et celle du café... L'amertume, sans doute.
Laurent Houndegla
Extrait de Regards croisés

L'humour est comme le café : meilleur très noir.
Bertrand Cèbe

Beaucoup de gens accordent au café le pouvoir de donner de l'esprit; mais tout le monde a pu vérifier que les ennuyeux ennuient bien davantage après en avoir pris.
Honoré de Balzac
Extrait de Traité des excitants modernes

Quand ça ne va plus, je change de café.
Georges Bernanos
Correspondance (1904-1939)

Certes, je veux bien aller au Ciel. Anatole France voulait bien y aller aussi mais à condition que l'on y serve le café au lait au lit... Le lit, je m'en moque, mais le café-crème, j'y tiens.
Louis-Ferdinand Destouches, dit Céline

Echangerais moulin à café contre café à Moulins.
Pierre Dac

Si l'on donnait du café au vaches, on trairait du café au lait.
Pierre Dac

Il est possible de boire un café dans un café, il est envisageable de boire de l'eau dans l'eau, il est souvent trop tard pour boire une bière dans une bière.
Philippe Geluck
Le chat a encore frappé (2005)

Toutes nos meilleures idées, nous les avons dans une sorte d'ivresse fiévreuse, dans l'ivresse du café.
Georg Christoph Lichtenberg
Aphorismes (1800-1806)

La vie, voyez-vous, c'est de changer de café.
Jean-Louis Rabeux
Aragon ou les Métamorphoses (1977)

Dans ma tasse, le café reflète mes idées noires.
Jules Renard

Vous êtes comme quelqu'un qui demanderait du café bouillant et qui le laisserait refroidir.
Jules Renard
Journal, 1887

Aujourd'hui, c'est la journée du café!... C'était un communiqué de l'Agence Tasse...
Laurent Ruquier
Il faut savoir changer de certitudes (1999)

Corse: Jean-Michel Rossi abattu à la terrasse du bar de la Piscine. - Il avait peut-être demandé un café allongé...
Laurent Ruquier
Vu à la radio (2001)

Les jeunes...

«Celui qui, entre vingt et trente ans, ne souscrit pas au fanatisme, à la fureur et à la démence est un imbécile. On est libéral par fatigue, démocrate par raison».
Cioran


«Notre espoir repose sur les jeunes gens qui souffrent de fièvre, parce que la purulence verte du dégoût les consume, sur ces âmes grandes dont nous voyons les possesseurs errer comme des malades à travers l'ordre des auges à porc. Il repose sur la révolte qui se dresse contre le règne du bon-garçonnisme, et qui exige les armes d'une destruction lancée contre le monde des formes, qui exige l'explosif, afin de balayer l'espace de la vie, au profit d'une hiérarchie nouvelle».
Ernst Jünger

«Je ne veux pas la paix, je veux mourir dans la passion et le combat. Je veux que ma mort soit ma plus belle victoire»
Gabriel d'Annunzio

«.Les jeunes doivent s'entraîner à la lutte, avoir le culte de la violence. Chez les jeunes, la violence patriotique est juste, nécessaire et souhaitable. Nous devons nous pénétrer d'une moralité de la violence et de l'esprit militaire».
Onesimo Redondo

«Vous n'êtes pas démocrates. Aucune jeunesse ne l'est. La démocratie est une invention d'adultes qui se ménagent et s'ef­fraient des déchaînements du sexe, du sang et de la mort. Et de la vie. Vous rêvez de cartouchières, dé commandes, de tribunaux, de torches et de fusillades, de cris et de chants, de drapeaux et de barricades, de complots, d'attentats, d'assauts, de discours enflam­més et de fièvre aux joues ...Un libéral, un démocrate, un modéré, un parlementaire ... pouah ! Les hommes politiques en veston ... pouah ! ... Vous avez envie de tuer, de conquérir, de punir, de trancher dans le vif ...l'envie d'être fanatique, sectaire, pur, dur, sûr, catégorique».
Jean Cau

«La résistance du Rebelle est absolue : elle ne connaît pas de neutralité, ni de grâce, ni de détention en forteresse. Il ne s'attend pas à ce que l'ennemi se montre sensible aux arguments, encore moins à ce qu'il s'astreigne à des règles chevaleresques, lisait aussi en ce qui le concerne que la peine de mort n'est pas
abolie».
Ernst Jünger

«Ou bien homme ou bien porc, Ou bien survivre à n'importe quel prix, Ou bien la lutte à mort. Entre les deux il n'y a rien».
Holger Meins

«Je voudrais voir tous les citoyens s'armer. Nous devons nous habituer à l'idée des armes, à la vue des armes, à l'emploi des armes. Nous tuerons peut-être des innocents par erreur, mais le sang versé purifie et sanctifie, et la nation qui le considère avec horreur a perdu sa virilité. Car il a des choses plus horribles que le sang versé; et l'esclavage est l'une d'elles».
Patrick Pearse

«Les grandes questions de notre temps ne seront tranchées ni par les discours, ni par des votes à la majorité, mais par le feu et le sang».
Otto von Bismarck

Paris par Cioran

Paris point le plus éloigné du Paradis, n'en demeure pas moins le seul
endroit où il fasse bon désespérer.

Cioran, cité par Nicolas d'Estienne d'Orves, le Figaro Magazine du 17
septembre 2005

Détail de l'un des manuscrits


La Roumanie souhaite acquérir les manuscrits de Cioran

Le Ministère roumain de la culture a l'intention d'acheter les 30
manuscrits inédits de l'écrivain Emil Cioran découverts à Paris, a
annoncé le Ministre de la culture, Adrian Iorgulescu. Les œuvres
font actuellement l'objet d'un litige entre la personne qui les a
trouvés en 1998 dans la maison de l'écrivain à Paris, et la
bibliothèque Jacques Dousset, l'institution qui détient les droits
sur l'oeuvre du grand écrivain roumain.
« Tout d'abord, la situation juridique doit être clarifiée : à qui
appartiennent ces manuscrits ? Puis, nous contacterons le détenteur
légal des manuscrits, et nous lui ferons une proposition
directement. Je pense que les héritiers de l'écrivain souhaiteraient
que les manuscrits soient mis à la disposition d'une institution
culturelle en Roumanie. » a déclaré le Ministre.

[www.Roumanie.com]

Geschiedenis en Utopie

Er is geen paradijs mogelijk behalve in het diepst van ons wezen en als het ware in het ik van het ik; en dan nog is het, om het erin te vinden, noodzakelijk alle paradijzen, de voorbije en potentiële, bekeken te hebben, ze met de onhandigheid van het fanatisme liefgehad of gehaat te hebben en ze vervolgens met de bekwaamheid van de teleurstelling onderzocht en verworpen te hebben.

Cioran noemde zijn geschriften eens 'oefeningen in anti-utopie'. Niet bereid een volgeling te zijn van andermans zaligmakende voorstellingen of (andersom) zelf een meester voor volgelingen te zijn - een eigenschap die hij deelt met Nietzsche - onderkende hij de dringende behoefte bij de grote massa om altijd weer achter een nieuwe waan aan te hollen maar al te goed. In 'Geschiedenis en utopie' analyseert hij de verschillende illusies die de wereld creëert om niet aan het heden te lijden: de nostalgie naar een imaginair paradijs in het verleden en de vlucht naar voren in een utopische toekomst. Cioran mag dan de noodzaak van deze ficties voor de gemiddelde mens onderschrijven, hij haalt ze ook weer even hard onderuit.

Dat is typerend voor Cioran, een extreme dialecticus die nooit tot rust komt in een geruststellende conclusie, maar die van zijn innerlijke gespletenheid briljant verslag weet te doen in messcherpe formuleringen die het schijnbaar onverenigbare verenigen.

Brief aan een verre vriend verscheen oorspronkelijk in het Frans literair tijdschrift NRF (Nouvelle Revue Française) in 1957 waarna het opgenomen werd in Geschiedenis en Utopie. De brief was gericht aan Constantin Noica (1907-1987). Noica werd in Roemenië opgesloten en de correspondentie met Cioran werd tijdens zijn proces tegen hem gebruikt.

Type : Paperback
Uitgever : Arbeiderspers, B.V. Uitgever De
Verschijningsdatum : 08/01/2003
Gewicht : 180 gr.
Lengte : 19 cm.
Breedte : 11 cm.
Hoogte : 2 cm.
Druk : 1
ISBN : 9029509732
Streepjescode (EAN) : 9789029509732

Geschiedenis en utopie - E.M. Cioran - Dirk Verhofstadt

Bestaan als Verleiding

Vertaling en inleiding van Maarten van Buuren (1948), als hoogleraar moderne westerse letterkunde verbonden aan de Universiteit Utrecht, essayist en vertaler.

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De reeks Beschouwelijk werk bevat eigenzinnige essays van originele denkers. Een van de eerste delen is van de Roemeense beeldenstormer, de Diogenes van Parijs, de vlijmscherpe analyticus van de Europese melancholie: Emil Cioran.
In Bestaan als verleiding, de vertaling van La tentation d'exister (1956), vormt Cioran in een reeks beschouwingen zijn levensfilosofie van de banneling, de eeuwige buitenstaander. De verscheurdheid van zijn eigen ballingschap, heen en weer slingerend tussen depressie en extase, tussen razernij en berusting, tussen spleen en ideaal, tracht hij te bezweren in een zoektocht naar de mystiek. De mystieke ervaring, verheven boven tijd en geschiedenis, beschouwt Cioran als het hoogste dat de mens kan bereiken.

Cioran - deze 'literaire satyr' zoals hij is genoemd - hanteert de filosofie als fragment, als explosie, hij is de ideale essayist. Als een ware erfgenaam van Nietzsche provoceert hij op de grens van goed en kwaad, eigenzinnig en persoonlijk, onbarmhartig en vitaal. Hij is een adembenemend stilist, die met behulp van paradox en omkering de lezer voortdurend prikkelt: 'we moeten leren te denken tegen onze twijfels en zekerheden'.

De vertaling van Maarten van Buuren is in stijl: exuberant, pregnant, bijtend en weemoedig.

Type : Paperback
Uitgever : HISTORISCHE UITGEVERIJ GRONINGEN
Verschijningsdatum : 07/01/2002
Gewicht : 365 gr.
Druk : 1
AVI-niveau : 0
ISBN : 9065544127
Streepjescode (EAN) : 9789065544124
vormgeving Felix Janssens

272 bladzijden

Bestaan als verleiding ~ Emil Cioran
A.IJ. van den Berg

We zijn niets waard - De gestileerde provocaties van Emil Cioran
Arnold Heumakers

De bokkensprongen van het humeur
Olaf Tempelman

Bittere Syllogismen


E.M. Cioran, Bittere Syllogismen
159 pagina’s
Uitgeverij De Arbeiderspers, 1993
vertaling door Huug Kalies van Syllogismes de l’amertume, 1952


A.IJ. van den Berg

Geboren zijn is ongemak

 

Op een manier die sterk aan Nietzsche doet denken, schrijft Cioran vanuit zijn door scepsis en rationalisme gedragen 'constructieve nihilisme' zo ongeveer tegen alles wat als hoog, heilig, onaantastbaar geldt. Ook als het door de zogenaamde avant-garde, door modernisten en progressieven wordt aangehangen en verdedigd. Ciorans levensfilosofie is er een van radicaal pessimisme en van een radicaal onder ogen zien van het verval waaraan de cultuur onherroepelijk lijkt blootgesteld. Dat verleidt hem echter niet tot gemakkelijke ironie of vrijblijvend negativisme. Cioran probeert teug te keren tot een waakzaam individualisme dat meer oog krijgt voor de eigen existentie en de mystiek dan voor de politiek-sociale leuzen die de afgelopen decennia zo gedomineerd hebben. Hij is onder geen enkele noemer te vangen en wat dat betreft valt hij (behalve met Nietzsche) te vergelijken met Multatuli.

*Bij Cioran wordt de kritiek niet gericht tegen de vervallen cultuur van West-Europa maar radicaal tegen de mens zelf. In een strenge, metalen stijl doet hij dat nog radicaler dan Nietzsche. Wat Cioran zegt is even waar als wat Machiavelli schreef. Beiden zijn er niet op uit idealen te doceren maar de werkelijkheid. En daardoor waarschuwen ze ons. Cioran schrijft daarbij zo briljant dat we bereid zijn hem te bewonderen ook daar waar hij het dolste van ons lijkt te verlangen.
Michel Butor

* Wie Cioran eenmaal gelezen heeft komt niet meer van hem los: de melodie en de scherpzinnigheid van zijn teksten doen de lezer naar steeds meer verlangen. Zelfs als hij zijn lezers kwelt, verwondt, hen genadeloos de grond onder de voeten wegmaait, hangen ze aan zijn lippen.
Süddeutsche Zeitung

Title: Geboren zijn is ongemak
Authors: Émile Michel Cioran, Edu Borger, Fred Backus
Publisher: De Arbeiderspers, 1984
ISBN 9029512474, 9789029512473
Length: 191 pages

Gustav



Les frères Cioran et le passé gardiste

Quand il voulait susciter le scepticisme des Parisiens, Emil Cioran se plaisait à dire que l'une des plus belles villes du monde était Sibiu/Hermannstadt. Et il pensait que Paris était devenue un "garage apocalyptique". De Sibiu, il disait à ses interlocuteurs étonnés: "C'est une ville vraiment extraordinaire". Il aimait évoquer le temps où il habitait cette cité transylvanienne, proche de la frontière qui séparait l'empire des Habsbourg du Royaume balkanique de Roumanie: "Il y avait là-bas trois nationalités (l'allemande, la hongroise et la roumaine) qui vivaient en parfaite convivialité. Cet fait m'a marqué pour toute ma vie, car, depuis, je ne parviens pas à vivre dans une ville où l'on ne parle qu'une seule langue, car je m'y ennuie tout de suite".

C'est à l'âge de dix ans qu'Emil Cioran arrive à Sibiu/Hermannstadt, après avoir pleuré pendant tout le trajet parce que son père, le Pope orthodoxe Emilian, l'avait arraché au paradis de son enfance, afin qu'il puisse poursuivre des études. Ce paradis, c'était le village de Rasinari. Mais l'écrivain dira plus tard: "Après Rasinari, Sibiu est la ville que j'ai aimée le plus".

Le puiné du Pope Emilian Cioran, Aurel, aujourd'hui octogénaire, habite encore à Sibiu. C'est un avocat à la retraite. Mais s'il n'avait pas pu devenir avocat, il serait devenu moine; ce fut son frère Emil qui l'en dissuada. Un soir, après le repas, Emil l'invita à une promenade dans les bois qui s'étendaient au-delà de la ville de Sibiu et jusqu'à six heures du matin, à force d'arguments de tous genres, il démontra à Aurel qu'il fallait qu'il renonce à cette idée de se faire moine. Plusieurs années plus tard, Emil regretta d'avoir eu cette importante conversation avec Aurel; il confessa qu'en cette circonstance toute l'impureté de son âme s'était manifestée et que son acharnement n'était que le seul fruit de son orgueil. Il dit: "J'avais l'impression que tous ceux qui ne se soumettaient pas à mes argumentations démontraient qu'ils n'avaient rien compris".

Donc, au lieu de se retirer dans un monastère, Aurel s'en alla étudier la jurisprudence à Bucarest, dans la même institution où Emil s'était inscrit en philosophie et lettres.

Les deux frères se sont retrouvés ensemble sur les bancs des mêmes auditoires, où le philosophe Nae Ionescu donnait ses leçons. C'était une sorte de Socrate pour les générations des années 30 et il a formé des intellectuels qui très vite acquerront une réputation mondiale, comme Mircea Eliade, Constantin Noica et Emil Cioran.

Ce dernier, m'a raconté son frère Aurel, se rendait régulièrement aux cours de Nae Ionescu, même après avoir terminé ses études universitaires. Un jour, alors que la leçon était finie, le professeur a demandé aux étudiants: "Voulez-vous que je vous parle encore de quelque chose?". Emil s'est levé et a demandé: "Parlez-nous de l'ennui". Alors Nae Ionescu a appronfondi la thématique de l'ennui pendant deux heures. Une autre fois, le Professeur Ionescu a demandé à Emil Cioran de lui suggérer un thème à développer au cours de sa leçon; Cioran l'invita à parler des anges. Dans une faculté dominée par le rationalisme, seul Nae Ionescu pouvait se permettre de traiter de thèmes spirituels, parce que, comme l'a défini Eliade, il était "un logicien terrible".

Immédiatement après la guerre, Aurel Cioran fut reconnu coupable d'avoir milité au sein du "Mouvement Légionnaire" et condamné à sept années de prison; sa sœur Gica reçut une peine analogue. Contrairement à Emil, qui s'est dissocié publiquement dans les années 60 de son propre passé de sympathisant de la Garde de Fer, Aurel revendique avec fierté l'option militante de sa jeunesse. Il a rencontré le "Capitaine" Codreanu dans des camps de travail légionnaires, où les jeunes réalisaient des travaux d'utilité publique négligés par le gouvernement.

Emil Cioran lui aussi fut fasciné par la figure de Codreanu; pour la Noël 1940, il écrivit un "profil intérieur" du Capitaine, dont on donna lecture à la radio à l'époque du gouvernement national-légionnaire. Dans ce texte, Cioran disait: "Avant Corneliu Codreanu, la Roumanie était un Sahara peuplé... Il a voulu introduire l'absolu dans la respiration quotidienne de la Roumanie... Sur notre pays, un frisson nouveau est passé... La foi d'un homme a donné vie à un monde qui peut laisser loin derrière lui les tragédies antiques de Shakespeare... A l'exception de Jésus, aucun autre mort ne continue à être présent parmi les vivants... D'ici peu, ce pays sera guidé par un mort, me disait un ami sur les rives de la Seine. Ce Mort a répandu un parfum d'éternité sur notre petite misère humaine et a transporté le ciel juste au-dessus de la Roumanie". Par ailleurs, quelques années auparavant, Emil Cioran avait écrit que "sans le fascisme l'Italie serait un pays en faillite"; ou encore: "dans le monde d'aujourd'hui, il n'existe pas d'homme politique qui m'inspire une sympathie et une admiration plus grande que Hitler".

On peut penser que les prises de position du Cioran de ces années-là, en dépit de ses abjurations ultérieures, seront tôt ou tard utilisée pour démoniser son œuvre, pour lui faire en quelque sorte un procès posthume, semblable à celui que l'on a intenté contre Mircea Eliade. Quand j'évoquai cette éventualité, Aurel Cioran a perdu pendant un instant son calme olympien pour manifester une grande indignation et stigmatiser la mafia qui se livrait à de telles profanations. Au cours de ces derniers mois, a-t-il ajouté, une campagne de diffamation s'est déroulée en Roumanie contre la mémoire de Nae Ionescu, précisément parce qu'il fut le maître de toute cette jeune génération intellectuelle qui sympathisait avec le "Mouvement Légionnaire".

De fait, à peine sorti de la maison d'Aurel Cioran, j'ai trouvé sur une échope trois éditions récentes de Nae Ionescu: un recueil de conférences tenues par le professeur en 1938 dans le pénitentier où il était enfermé avec toute l'élite du "Mouvement Légionnaire". Parmi les internés, il y avait aussi Mircea Eliade. Emil Cioran était en France depuis un an.

Claudio Mutti

(article paru dans le quotidien indépendant L'umanità, 22 février 1996).

" Tous ces mots, quelle nourriture ! - Alphonse Juilland

Alphonse Juilland fut l'invité d'honneur de la Journée Céline en mai 1995, tout auréolé de sa gloire célinienne : celle d'avoir découvert Elizabeth Craig, puis d'avoir vu cette fabuleuse somme sur Elizabeth et Louis traduite et publiée par Gallimard. Le fait d'être édité par la prestigieuse maison l'émerveillait comme un enfant.

La dette que nous avons contractée envers Alphonse Juilland est immense. Ses travaux sur les néologismes céliniens constituent une analyse stylistique d'une richesse inégalable. Sans compter le bonheur de lecture. C'est aussi ce que pensait son ami Cioran, qui lui écrivait :

" Tous ces mots, quelle nourriture ! Cela vous fortifie, vous libère du cafard, vous réconcilie avec tout ce que le quotidien comporte d'intolérable. Un stimulant ! Il faudrait que les psychiatres en proposent l'usage."

Partant de l'idée qu'il est préférable de rendre hommage aux gens méritants de leur vivant, nous lui avions consacré, en juillet 1994, un petit dossier composé de différentes études et témoignages. On en retrouvera quelques-uns dans ce numéro, ainsi que d'autres, inédits.

Outre les mérites incontestés d'Alphonse Juilland dans le domaine célinien, il convient de souligner aussi ses qualités de cœur, cet humanisme souriant qui était le sien. Très affecté par le décès de son épouse survenu il y a trois ans, il m'avait écrit à la veille de Noël 1999 une lettre bien émouvante : " Pardonnez mon silence. Il serait trop long et oiseux de vous raconter les déboires qui m'ont affecté ces derniers temps. J'espère quand même revenir à mes moutons dans quelques mois et, Deo volente, vous revoir en l'an 2000. Il faut d'ailleurs que je me dépêche, car le temps file – , j'ai fêté, pour ainsi dire, mon 77ème anniversaire il y a quelques mois – , et il me reste encore pas mal de pain célinien sur la planche. C'est grave, car Céline m'a prévenu dans son motto aux Bagatelles, je crois, qu' "Il est vilain, [qu'] il n'ira pas au Paradis celui qui décédera sans avoir réglé ses comptes". Or, pour moi, régler mes comptes, c'est mener à bon terme une demi-douzaine de volumes en souffrance sur les néologismes inventés par Céline. Et comme j'ai très envie d'aller au Paradis pour y retrouver ma femme, qui devra m'y attendre pendant les quelques millénaires de Purgatoire que j'ai accumulés le long des années, il faudra que je me remette au travail sans trop tarder."

On retrouve dans ce message toute l'ironie et la tendresse d'un homme que nous étions quelques-uns à admirer et à aimer tout à la fois.

Nous n'oublierons pas Alphonse Juilland.

Marc Laudelout

Éditorial, Le Bulletin célinien n°213 (10/2000)

Interview with Andrei Codrescu

Excerpt:

Q: And do you know some other cities in Europe, in the world?

A: Oh, yea. I mean the other cities I know, I know Paris to some
extent. I always, but I've never lived there long enough to become
intimately acquainted with Paris. And I knew Emil Cioran, the
Romanian-born philosopher who was very much a citizen of la Rive
Gauche, and he said one time, I asked him whether he would like to
come to America and give a talk and he said absolutely not. And I
said why Cioran? And he said because I am a provincial. And he meant
he was an inhabitant of his street in Paris.
A: Yes, he lived in a small apartment and he lived modestly. I
visited him about 5 or 6 times. We had dinners and walks and we
wrote letters to each other. He was a very, very tonic man. It was
wonderful to be with him.

He was so depressing that he was tonic. I mean he had this sort of
an uncompromising view of life as series of disasters, and that, for
some reason, makes me happy. In his world there were cosmic
accidents, huge ontological mistakes, but there was a great vitality
to his diagnosis. He burst with health. He told you that everything
was dying but he told it to you in such a vital way, with such a
sense of humor, that you felt absolutely buoyed by it.

A: No he made the most of it. He loved women too.

He liked to give that impression and he wrote about it but he
conducted long flirtations first through the mail and he told a lot
of funny stories about it. And it was great sitting with him in the
café because his eye would just wander down the street all the time.
He was then in his seventies but he was a very vigorous man. He took
long walks along the Seine and he was extremely conservative in his
political view, which was not very fashionable in the 70s. It wasn't
a fashionable conservatism either you know because there was that
very element of fronde in everything he did. One time I twisted my
ankle because I tried my son's skateboard in Paris. I was staying on
the 10th floor of this building and I had an appointment to see
Cioran, but couldn't walk. He said, that's fine, I'll come to you.
And he walked up to the 10th floor, the elevator wasn't working, and
when he got there he told stories to my child. My son was then 6
years old and he just talked to him the whole time and he told him
stories in English. He was quite a wonderful character.

It wasn't a joke. He considered himself a citizen of the Quartier,
that was his province and he just didn't want to go anywhere else.
Of course there is a degree of pride in it, this is one neighborhood
everybody in the world goes to. So the mountain always comes to
Mohammed in this neighborhood but you know it's typically funny
because Cioran really loved these streets. He didn't like going
anywhere and that was that. And when I first called him he didn't
want to talk to me. I started talking to him in Romanian and he said
I don't speak that barbaric language.

A: and I said, I'm sorry. He said where are you from? And I said
Sibiu and he's from Sibiu, so he said oh well, that's different. And
then he told me; there are only two cities in the world, Sibiu and
Paris. He really believed that. He had established his centre of the
world. So yea I know Paris a bit but you know, I know Rome. I lived
a year in Rome.


Source (full interview):
http://aubepine.blog.lemonde.fr/2006/12/07/entretien-avec-andrei-
codrescu-2/

Obituary: Ilinca Zarifopol Johnston, 52

July 25, 1952 - January 18, 2005

BLOOMINGTON, Ind. -- Ilinca Zarifopol Johnston died Tuesday, January 18, 2005, at her home in Bloomington, Ind., after a five-year struggle with ovarian cancer. She was born in Bucharest, Romania, the second child and daughter of Radu Constantin (Dinu) Zarifopol and Mioara (Maria) Economu.

She was preceded in death by her father. Survivors include her mother, and her sister and brother-in-law Christina and Lukey Illias, all of Bloomington. She also is survived by her husband, Kenneth R. Johnston and their son, Theodore Constantin Zarifopol Johnston, both of Bloomington; by her step-sons, Lucas Martin Johnston, of Springville, Ind., and Matthew Nils Johnston, of Blacksburg, Va.; by her step-daughter, Kate Elizabeth Johnston, of Washington, D.C. Her survivors also include her nephew, Andre Illias, of Washington, D.C.; four grandchildren, Jordan and Jossi Zollman, and Aaron Johnston, all of Springville, Ind., and William Odell Johnston of Blacksburg, Va.

A brief memorial service -- the trisagion -- will be held Thursday, January 20, 6 p.m., at All Saints Orthodox Christian Church, 6004 Fairfax Road, Bloomington, with the Very Rev. Father Athanasius Wilson presiding. Following the service, friends are invited to a reception in her honor at her home at 1112 Atwater Avenue, Bloomington.

A funeral mass and burial will be held on Saturday, January 22, 10:30 a.m., at the Dormition of the Mother of God Romanian Orthodox Monastery in Rives Junction, Michigan, Father Wilson and the Very Rev. Roman Braga, presiding.

Ilinca Zarifopol Johnston graduated from the University of Bucharest in 1975, majoring in English and German. Her senior thesis "Speech Acts of Permission in English" was awarded the first prize of the Romanian National Student Scientific Colloquium for 1976. After official interventions on her behalf by nearly a dozen U.S. Congressmen and Senators, she was allowed to emigrate to the United States in 1977.

She subsequently earned an M.A. from Indiana University in 1980 in linguistics, and a Ph.D. from IU in 1990 in comparative literature. Her dissertation on Victor Hugo, Charles Dickens and Emile Zola was awarded the Esther L. Kinsley Outstanding Dissertation award in the IU graduate school. It was published as "To Kill a Text: The Dialogic Fiction of Hugo, Dickens and Zola," by the University of Delaware Press in 1995. She also published many articles and reviews on other subjects in comparative literature.

At the time of her death, Zarifopol Johnston was associate professor of comparative literature at Indiana University in Bloomington where she had served as director of both undergraduate and graduate studies. She won an Outstanding Junior Faculty award in 1993 and two teaching excellence awards. She was awarded year-long fellowships by both the National Endowment for the Arts (1993) and the National Endowment for the Humanities (1999), as well as a Presidential Humanities Initiative fellowship from IU in 2002, among other internal awards.

She was a visiting lecturer at the University of Lisbon, Portugal, in 2003.

In recent years, Zarifopol Johnston's research interests had returned to her native Romania, specifically as the American translator and editor of the early Romanian texts of the French philosophical essayist E.M. Cioran (died 1995). In 1992 she published Cioran's "On the Heights of Despair" with the University of Chicago Press, and in 1996 his "Tears and Saints," also with Chicago Press. The latter was nominated for the Modern Language Association's prize for outstanding literary translations.

At the time of her death, she was engaged in a critical biographical study of Cioran, tentatively titled, "Portrait of the Philosopher as a Young Man." In addition she was writing a memoir of her own life, called "The Escape Artist: Memoirs of a Communist Girlhood," and a memoir of her friendship with Cioran in Paris. Finally she was engaged in translating her father's four-volume novel, under the general title of "The Moldavian Quartet." The novel was written in the 1960s and 1970s but was not published until 1994-98, after the 1989 fall of Nicolae Ceausescu's government in Romania made its appearance possible, and gained him immediate membership in the Romanian National Writer's Union. She had finished the first volume, "The Last Boyar," which takes place entirely on August 23, 1944, the day the Russians invaded Romania, and Romania switched sides from the Axis to the Allies. It centers on the departure of the Nazi troops from her father's family estate in Moldavia amid escalating rumors, hopes and fears about the advancing Soviet armies.

Source: Indiana University

Lydia Lunch on Cioran

Interview excerpt

Linda Wolfe: The philosopher E.M. Cioran has had a major influence on you. Your newest record, Matrikamantra is inspired by his writings. What part of his philosophy closely parallels your own?

Lydia Lunch: Well, first and foremost, what attracts me to any writer is the language. The poetry of Cioran's writings is what draws the eye in and causes one to glut on every book you can get your hands on. The cynicism, the sarcasm, and yet there is something very sweet about his writing. Yet, I don't know where the sweetness lies. He is a forefather to my own thought, there to underline the hypocrisy, the day to day life, the struggle of the human condition, the nightmare of rising everyday. Writers like Nietzsche, Cioran, Bataille, Foucault, Deleuze, they make me laugh. Other people may find them heavy, dry.

Linda Wolfe: Cioran writes, from his book, On the Heights of Despair ... "I am displeased with everything. If they made me God, I would immediately resign..." If you were God, what would you do first?

Lydia Lunch: WHICH GOD? WHOSE GOD? GOD WHO? It's a concept I can not relate to. It's a concept that means nothing in my reality. I am energy. We are all energy. It's obvious what I do with my energy. Therefore, in my own reality, no doubt, I am goddess. You know what I do, that's why you are talking to me. I would do no different than what I do now, perhaps only on a grander scale (laughs). And if I can force more pomposity into my own life, which is questionable.

Free Williamsburg - May 2000
http://www.freewilliamsburg.com/still_fresh/may/lunch.html